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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

La Quadrature du Tram

Je prends le T2 tous les soirs pour gagner la Défense, hier un peu plus tard que d’habitude. Même si je suis plongé tous les soirs dans mon bouquin, il n’en reste pas moins que l’une de mes activités favorites consiste à mater mes congénères. En effet, j’adore regarder les gens et m’imaginer tout un tas de bêtises sur eux.

Adidas PrajnaHier soir, je suis rentré un peu tard, je me suis dirigé cahin-caha vers Suresnes-Longchamps. J’ai été doublé dans mon ascension d’un terrible escalier de pierre par un grand échalas peroxydé plutôt jeune et fashionisé, certainement une copine… En ce moment, je vois de plus en plus de mecs en pompes Adidas montantes vraiment affreuses, mais bon je ne critique pas trop, si ça se répand je vais en mettre et trouver ça génial. Arf.

Peroxydé tourne la tête, elle me mate la rouée ! Quand je vous dis que c’est écrit sur ma gueule que je suis de la maison. Ensuite, elle se débrouille, très ostensiblement, pour monter par la même entrée que moi dans le Tram. J’ouvre mon bouquin et me plonge dans mon nouvel opus des aventures de Nicolas LeFloch. Peroxydé se met à côté de moi, en fait je suis collé contre un montant en métal près de la porte, et lui se positionne simplement de l’autre côté du même montant (à gauche de moi). Ainsi, nos flancs sont légèrement en contact. Contact que je sens de plus en plus ferme depuis quelques temps, avec un bras qui s’attarde étrangement sur la barre. Moi je fais ma pétasse, je ne réagis pas… ni oui, ni non. Un simple rictus me déride et je suis bien distrait de ma lecture. Sacré Peroxydé !

Et puis, d’un seul coup : un cri sur ma droite ! « Ooooooooh Chériiiiiie ! Vieeeens je t’ai gardé une place !! » Aheum… une autre pédale a investi les lieux et se fait remarquer à renforts de jappements et autres couinements dévirilisés. Un peu Gucci-Prada sur les bords, je me souviens de cet homo que je vois assez souvent dans les transports. Il raconte toujours ses soirées à sa meilleure copine, et accessoirement à toute la voiture qui ne peut pas en rater une miette. Et puis, je me prépare à continuer mon bouquin mais je jette d’abord un regard circulaire. Et voilà que j’en repère un autre juste en face de moi (près de la porte aussi mais diamétralement opposé) !!! Un blondinet pas mal de sa personne, et aussi affublé d’un roman.

Attention, la suite devient complexe. C’est là, en une minute, que nous sommes entrés dans la quatrième dimension.

Je jette un coup d’oeil à Peroxydé, je le vois qui mate Blondinet. Je regarde Blondinet, il est en train de jeter un oeil à Gucci-Prada. Gucci-Prada lui rend son regard. Blondinet, du coup, tourne la tête vers moi. Je suis gêné, je tourne à mon tour mon regard vers Gucci-Prada, qui me repère alors aussi. Je le vois qui décale légèrement son regard, et hop, c’est Peroxydé qui entre dans sa ligne de mire.

Blondinet et moi finissons par nous regarder, il regarde à sa droite, à sa gauche, je jette un coup d’oeil à ma droite, à ma gauche. Nous nous faisons un sourire complice et narquois. Il se replonge dans son bouquin, je me replonge dans le mien.

Pendant cette minuscule période de quelques dizaines de secondes, le temps s’est comme suspendu et j’ai sur le moment pensé que nous étions très indiscrets. Mais en fait, personne n’a rien remarqué. Ce ne furent que des coups d’oeil fugaces, échangés entre quatre personnes qui se sont tour à tour repérées. Le plus drôle c’est que nous formions une brochette de pédés complètement disparate, mais que cela n’a pas du tout empêché que l’on se repère avec beaucoup d’acuité.

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