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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Myra Breckinridge et Myron

Je m’étais déjà dit que Gore Vidal avait écrit le plus dingue et le plus queer des romans avec « En direct du Golgotha », mais j’avais tort. C’est celui-ci qui remporte assurément la palme. Ce bouquin est un délire à l’état pur, mais tellement agréable à lire, avec des personnages et des situations irrésistibles, et surtout, une intrigue qui finalement rentre dans l’ordre, tout en restant complètement décalée. Incroyable !

Deux parties relativement distinctes font qu’à un moment, en lisant la seconde, on devient vite persuadé qu’elles n’ont presque rien à voir l’une avec l’autre, et dans les dernières pages, on réalise à quel point c’est tout le contraire.

Myra Breckinridge est une femme qui impressionne tout le monde, une femme avec un charisme et un orgueil gonflé comme un zeppelin, une ambitieuse et une dévoreuse. Elle débarque à Hollywood et va trouver l’oncle de son défunt mari (Myron) qui tient une sorte « d’Actor’s studio », afin d’en récupérer une partie en tant qu’héritière (l’école devait revenir en partie à la mère de Myron). En attendant que l’oncle fasse quelques recherches pour vérifier les dires de cette bonne femme qui débarque de nulle part, il lui propose d’enseigner pendant quelques temps un cours « d’empathie » et de « maintien ».

Myra devient vite à la fois la coqueluche des étudiants, et en même un dragon redoutable et redouté. En fait, l’oncle découvre qu’elle n’est autre que son neveu qui a subi une opération de changement de sexe !!! Cela n’empêche pas Myra d’être plus femme fatale que jamais, et un brin amazone sur les bords. Cette partie du récit est hilarante, vraiment cet auteur a un donc pour l’irrévérence et l’humour queer le plus potache. Myra finit d’ailleurs par sodomiser une espèce de Marlon Brando en puissance, tandis qu’elle arrive à ses fins en charmant la petite amie de ce même garçon. Cela aboutit à un retournement de situation des plus burlesques puisque Myra en tombe sincèrement amoureux, et redevient Myron.

La seconde partie est de la pure science-fiction qui, on le découvre à la fin, fait partie d’une trame toute à fait logique et cohérente. Myron (Myra qui est redevenu Myron) se retrouve pris au piège du tournage d’un film de la Métro de 1948 (La Sirène de Babylone). Il est condamné avec plusieurs personnes (qui débarquent depuis plusieurs périodes temporelles) à revivre ces huit semaines de tournage, encore et encore. Et là encore plus étrangement, Myra ressurgit comme une double personnalité de Myron. Chacun prend tour à tour le pas sur l’autre, et le contrôle du corps. Myra veut alors se débarrasser de son nouveau pénis, et retrouver sa poitrine siliconée, tandis que Myron lutte pour conserver son intégrité retrouvé. Et dans tout cela, le tournage a lieu avec cette population particulière, perdue dans l’espace et le temps, et dont l’influence sur le tournage n’est pas si bénigne.

Je ne peux pas en dire plus, sinon c’est du gâchis. Mais sachez que Myra finit tout de même dans le lit de Jean-Pierre Aumont, à vouloir vasectomiser un pauvre figurant, ou à transsexualiser un rouquin viril à grosse bite. Elle a un plan et se bat pour que les Etats-Unis aillent mieux, ne fassent plus la guerre et soient moins peuplés pour que les gens soient plus heureux.

Voilà un bouquin qui est un feu d’artifice d’inventions et de fantaisies. Gore Vidal est un histrion qui a aussi une plume aiguisée, et qui en filigrane égratigne qui de droit, et véhicule comme cela son opinion avec beaucoup d’efficacité. J’y souscris avec beaucoup d’énergie et d’alacrité*.

Je viens de voir qu’un film existe sur le roman. Celui qui a ça et qui est dans le coin, il faut absolument qu’on s’arrange !! :mrgreen:

*Juste pour toi mon Olichou.

Gore Vidal - Myra Breckinridge and Myron

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