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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

La mythologie de l’enfance

Je vous ai déjà parlé d’Osny. Cette ville natale qui compte énormément pour moi, et qui fut le fief de mes tendres années. Mes parents se sont connus là. Ma mère est née dans la maison où elle habite aujourd’hui. Mon père allait en vacances dans cette ville, tandis qu’il habitait avec ses parents rue du Faubourg du Temple (à deux pas de chez moi, aujourd’hui) à Paris. Mes grands-parents paternels se sont installés définitivement sur Osny très tard. Et curieusement, toute la famille y fut peu à peu rassemblée (les six soeurs et le frère de mon père, les deux frères et la soeur de ma mère). D’ailleurs nos voisins de pallier quand j’étais gamin étaient mes cousines-frangines. Vous vous souvenez ? C’est pourtant simple : le frère de ma mère est marié avec la soeur de mon père. ;-)

J’avais beaucoup d’imagination quand j’étais môme, comme je le disais précédemment j’étais impressionné par les histoires de mythologie, et les récits fantastiques (comme mon premier coup de coeur littéraire en CE1 : « la sorcière de la rue Mouffetard »). Mais je voulais vous montrer comme mon environnement se prêtait merveilleusement à délier mon esprit fantasque.

La nuit de samedi à dimanche, je suis sorti vers une heure du matin (j’avais reçu quelques sms qui m’empêchaient de me coucher tout de suite). J’avais une irrépressible envie d’errer dans les rues désertes, et je voulais faire mon chemin de croix, mon pèlerinage habituel sur mes terres sacrées. Quand j’étais tout petit (littéralement), les choses me paraissaient immenses et énigmatiques, je ne décodais pas tout ce qui m’entourait et j’y attribuais donc forcément une dimension mystique, qui ne s’est d’ailleurs pas tout à fait évaporée avec les années. C’est ainsi que des choses, des lieux, des êtres, des marques urbaines les plus banales revêtent une importance remarquable à mes yeux.

La mythologie de mon enfance…

Tout commence par une description géographique : une immense Vallée herbeuse qui est délimitée par une Colline d’un côté, un Plateau de l’autre, et une Rivière. On y trouve aussi un Obélisque et un Sanctuaire. La Colline était dominée par ma grand-mère qui était la Reine de cet endroit, alors que le Plateau était le fief de mon grand-père. C’est drôle mais j’ai toujours été sensible au fait qu’ils étaient tous les deux seuls dans leur « domaine » (je n’ai pas connu mon grand-père maternel, et très peu ma grand-mère paternelle), et habitaient l’un « en face de » l’autre sur leurs promontoires, juste séparés par cette vallée.

Plan d'osny et mes mythes

Concrètement, la vallée est le quartier de Lameth avec la colonne commémorative qui porte aussi son nom. La colline est le quartier de la Muette où ma grand-mère maternelle habitait, et où je passais une partie des vacances et mercredis, tandis qu’à l’opposé sur le plateau des Bruyères j’allais chez mon grand-père paternel. La rivière n’est pas le Styx mais simplement la Viosne, endroit où mes parents ont appris à nager. Elle délimite une zone marécageuse, appelée marais du Missipipi. Quant au sanctuaire, je ne sais toujours pas vraiment ce que c’est, mais il existe toujours. Il s’agit d’une propriété qui est remplie d’étranges sculptures faites d’assemblages de pierres granitiques ou concrétions calcaires. Les hasards de la nature donnent une forme reconnaissable à ces statues. On y voit un curieux bestiaire, des hommes, des femmes, des monstres…

Plan d'osny et mes mythes, plan réel

En attendant, cette nuit je suis repassé par tous ces endroits avec à chaque fois le coeur qui battait la chamade. Ces lieux sont chargés de souvenirs et de « mysticisme » pour moi… Je suis revenu faire des photos le dimanche aprème, mais la veille j’avais parfois un peu la trouille (surtout devant le Sanctuaire, vous allez comprendre…).

Ce qui est vraiment drôle par rapport à l’enfance, c’est que tout cela me parait bien petit aujourd’hui, et surtout se parcourt en une dizaine de minutes à pied ! Il faut d’abord descendre de chez ma grand-mère vers le quartier de Lameth qui est en effet en contrebas. Il faut aussi imaginer le quartier vingt ans plus tôt avec deux fois moins d’habitations !

Quand on est en bas, on voit vers la droite, vers chez mon grand-père :

Vue du Plateau

Et vers la gauche, vers chez ma grand-mère (la colline, on ne se rend pas compte mais il y a en effet un dénivelé) :

Vue de la Colline

On arrive rapidement sur ce grand terrain agréable, où on aperçoit l’obélisque.

Vue de l'Obélisque de la vallée

Et le voilà donc ce monument qui a été élevé par un noble du coin (comte Charles Malo de Lameth (1757-1832)) en hommage à ses neveux morts pour la patrie. Pour moi, c’était l’Obélisque ! Et sa pointe en métal était susceptible de servir d’antenne pour recevoir des messages secrets.

Obélisque de Lameth

Je me suis ensuite dirigé vers la Viosne et puis j’ai emprunté l’escalier qui permet de monter vers la rue de mon grand-père. Cet escalier est mythique pour moi, puisqu’il me fatiguait terriblement quand j’étais môme. Mais je l’ai remonté des centaines de fois puisqu’il avait la fantastique particularité de proposer un toboggan urbain des plus périlleux et irrésistibles.

Escalier de Lameth

En effet les barres métalliques peuvent servir de glissières pour des enfants. Mais ce qui m’a surpris et beaucoup ému c’est qu’en montant par là, deux petits gamins d’à peine dix ans faisaient la même chose. Comme quoi ces traditions se poursuivent sans mode d’emploi. D’ailleurs nous avions interdictions formelles de jouer à ce petit jeu dangereux. Nos parents nous avaient fait part d’une légende urbaine d’un enfant qui s’était étranglé avec ses clefs qu’il avait autour du coup, et s’étaient accrochées aux barres. Sordide ! Je suis certain que c’est toujours interdit, mais allez donc prohiber l’usage d’un toboggan…

Mon grand-père est mort en 1993, et il ne reste rien de la maison (dont la base avait été construite en bois, c’était presque un cabanon) d’origine. Son terrain a été complètement remodelé. Seuls subsistent une partie de la vieille clôture, et surtout le petit portail d’entrée rouillé et décati, qui s’ouvre à présent de manière absurde (comme dans un Tex Avery) sur une dense haie de thuyas.

Portail de mon grand-père

Je suis redescendu par l’escalier, et je n’ai pas pu résister, j’en ai fait un tour (et j’ai sali mon jean, et môman m’a dit en rentrant « Mathieuuuuu, mais où es-tu allé mettre tes fesses !!! »).

Toboggan de Lameth

Ensuite je suis allé voir un peu la Viosne (ça je n’y étais pas passé la nuit, courageux mais pas téméraire !). Elle serpente toujours aussi calmement. Dire que mes parents ont appris à se baigner là, elle était parait-il transparente à l’époque ! Qu’est-ce que j’ai pu jouer là ! Elle était interdite à l’époque de mes parents, comme à la mienne bien évidemment (bon mais elle est vraiment crade aujourd’hui ! Arf.).

La Viosne La Viosne

Et enfin, en remontant vers chez ma grand-mère (aujourd’hui ma mère), on peut passer devant le Sanctuaire. Donc voilà l’endroit… Des sculptures étranges que mes parents ont eux-mêmes toujours connu (!!!), mais il y en a régulièrement des nouvelles qui s’ajoutent aux anciennes. Certaines ont un air « art primitif » et d’autres sont carrément flippantes (je ne vous dis pas l’impression à deux heures du matin avec les ombres de la lune). On passait devant avec ma cousine en essayant de tenir le plus longtemps possible sans avoir les chocottes.

Statues du Sanctuaire Statues du Sanctuaire Statues du Sanctuaire

Statues du Sanctuaire Statues du Sanctuaire

Je suis rentré dans la nuit vraiment content de mon périple. J’étais sorti par la fenêtre de ma chambre en plus pour ne pas faire de bruit dans la maison, un vrai gamin. J’avais fait ce truc débile qui me tenait à coeur. Voilà donc les bases de mon système mythologique de l’enfance, mais ce n’est vraiment qu’un embryon. Il ne faut vraiment pas oublier tous ses codes et ses lubies d’enfance. Je les garde bien au chaud en moi, j’en ai encore tant et tant malgré ce qui a du m’échapper avec les années.

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