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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Les carnets blancs (Mathieu Simonet)

Ah c’est toujours un exercice difficile que de parler du bouquin d’une personne que l’on connaît. Et Mathieu cela fait près de dix ans je pense que nous nous fréquentons de près ou de loin, souvent par le plus grand des hasards. J’avais déjà évoqué ce curieux phénomène (merde le post en question date de 2004 !!!) qui consiste à ce que nous nous croisions sans arrêt pendant quelques semaines, puis plus du tout, puis par des connaissances communes lointaines… Bref, c’est très imprévu et agréable car toujours inopiné. Il y a eu cette première rencontre à l’anniversaire d’un pote de pote, puis l’anniversaire suivant de cette même personne, après quelques rencontres par hasard dans la rue, puis son blog sur GayAttitude, et puis le net qui nous a forcément rapproché car mis dans une sphère plus « communicante ». Et les trois dernières années, j’ai eu l’honneur d’être chroniqueur de l’émission de radio qu’il animait, et où je parlais de blog (il faut d’ailleurs que je remette ce truc en ligne).

Depuis que je le connais, Mathieu écrit, il tente de publier, et se fait rembarrer. Il persiste. Il fait ses jeux littéraires, il « joue » avec ses carnets. Ironie du sort, son premier roman que voici est le récit circonstancié des carnets dont il s’est débarrassé !! Et ces journaux intimes, il a commencé à les écrire dans les années 80 (préadolescent), et il est arrivé avec une centaine de carnets dans les années 2000. Pour une raison assez floue pour moi, il a fallu qu’il s’en sépare, mais pour bien marquer la chose, et surtout, je pense, avec un truc un peu narcissique et flamboyant, il a organisé une véritable démarche artistique. Les carnets ont été transformés en œuvre plastique, en robe, cachés dans des vêtements, sur des gens, détruits de façons diverses et variés, sublimés en parfum ou utilisés comme palimpsestes et encore bien d’autres idées plus fantasques et farfelues les unes que les autres.

Le roman suit ce triple cheminement, il y a les extraits de carnets, la vie et « post-vie » de ces journaux, et le parcours même de l’écrivain qui mène à l’édition du présent ouvrage. J’ai beaucoup aimé le bouquin aussi parce que tout cet univers m’était familier, et je ne sais pas comment ça peut être perçu par autrui. Du coup c’est bien de l’autofiction, mais qui ne rentre vraiment pas dans les standards du genre.

Et puis, il y a le contenu, et là on retrouve tout l’univers de Mathieu Simonet. On y lit donc des relations familiales aussi importantes que dysfonctionnelles, une affirmation flagrante de son orientation sexuelle, des projets artistiques qui naissent tous les quarts d’heure, et surtout une passion dévorante et sincère pour l’écriture. Il y a parfois des choses assez énormes et qui paraissent gênantes pour le lecteur, car nous lisons des journaux intimes, et l’auteur s’y livre donc avec authenticité et (sa) vérité. Mais l’écrivain traite tout cela avec une certaine distance, parfois comme un étalage de faits, et une simplicité de ton qui fait passer les anecdotes les plus troublantes. Mathieu n’est pas du genre à rougir de ses attitudes ou des péripéties de son existence, et en tout cas ses écrits témoignent d’une saine et rafraîchissante liberté de ton.

Roman, parcours initiatique, lutte pour écrire, journal intime, démarches artistiques, on trouve de tout dans ce bouquin polymorphe et assez unique en son genre.

En revanche, le ton un peu chirurgical et factuel des récits finit un peu par lasser, c’est le seul bémol que je noterais. Évidemment le fait d’être son propre héros limite un peu l’imagination et les scénarios un peu plus piquants, même si l’auteur a une vie bien assez tumultueuse pour au moins susciter de la curiosité et accrocher le lecteur. Mais parfois j’aurais aimé un peu plus de retour sur les faits et les actes qui sont plus consignés qu’utilisés pour parler au lecteur, ou jouer avec. Il y a au final un petit goût d’inachevé, une impression de “bon d’accord et maintenant ?” qui ne gâche pas l’ensemble, mais m’a désappointé.

Maintenant j’attends surtout avec impatience le prochain bouquin car j’aimerais bien lire du Mathieu Simonet avec son style et tous ces machins qu’il a dans la tête.

Les Carnets Blancs (Mathieu Simonet)

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  • J’aimais son blog, je l’ai rencontré une fois : il est charmant, il écrit bien et en plus c’est un très beau garçon !
    J’ai prévu de lire son livre dès que j’ai un peu de temps.

  • J’ai mis du temps à le lire, j’avais plein de trucs à finir. Et puis j’ai mis du temps à écrire le post, je suis en retaaaaard !!! :ghost:

  • Comme tu le dis, il est temps de remettre le “truc” en route … reconnais que je n’ai pas insisté depuis longtemps !
    Et puis tu peux ajouter que Mathieu a fait de son bouquin un jeu (ou l’inverse, ce qui est tout aussi vrai)et qu’il poursuit l’expérience ; si tant est que le Lecteur (remarque mon respect) aime aussi jouer, on n’a pas fini d’en parler. :yeuxlove:

  • Cool tu as écrit le billet que j’aurais voulu écrire, à peu de choses près.
    (le ton chirurgical : en fait je crois tout simplement que les contraintes éditoriales ont obligé à trop dégraisser, notamment la fin qui précipite un peu trop. “le fait d’être son propre héros limite un peu l’imagination et les scénarios un peu plus piquants” : que nenni, la réalité a parfois tellement plus d’imagination que la fiction qu’elle en est même invraisemblable (bon, OK, pas forcément dans le cas de Mathieu, encore que)).
    Oui moi aussi hâte de le lire sur d’autres sujets (moins, euh , destructeurs ?), parce qu’il y a là quelqu’un.

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