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Un long silence (Mikal Gilmore)

Un long silence (Mikal Gilmore)

Mikal Gilmore est auteur pour le Rolling Stone magazine et ce bouquin est son autobiographie sous le prisme particulier d’un drame qui a marqué son existence. En effet, son frère, Gary Gilmore, a troublé l’opinion publique quand en 1977 il a demandé à être exécuté par la justice de l’Utah après le meurtre de sang froid de deux jeunes hommes (mormons). L’auteur remonte aux sources, le plus loin possible, pour nous expliquer la genèse de sa famille, et il déroule ensuite jusqu’à son propre rôle dans cette “histoire”. Le livre est curieux car il possède une trame romanesque incroyablement forte et tellement dans l’esprit de la “légende de l’Amérique”, et en même temps c’est un exposé assez factuel et une putain d’histoire vraie. J’ai absolument adoré le bouquin parce qu’il est brillamment écrit, mais surtout autant défendu par une documentation solide qu’une plume acérée et criante de sincérité.

Mikal Gilmore remonte donc à l’histoire de sa mère, Bessie, mormone en rupture avec une famille traditionaliste d’Utah, et qui s’est littéralement enfuie avec le futur père de Mikal. Frank Gilmore est un alcoolique et surtout un escroc à la petite semaine qui parcourt les Etats-Unis en vendant des espaces publicitaires dans des supports qui n’existent pas. Il a un millier de noms différents, a été inculpés n fois, a une kyrielle d’enfants illégitimes et d’ex épouses ou petites amies, en plus d’être violent avec Bessie et ses garçons. Les garçons, ce sont Frank Jr, Gary, Gaylen et Michael (devenu par la suite Mikal), et parmi eux Gaylen et Gary étaient des délinquants, Frank Jr s’est occupé de sa mère jusqu’au bout, tandis que Mikal a plutôt fuit son environnement pour s’en sortir relativement bien dans l’écriture. Gaylen est mort assassiné d’un coup de couteau, et Gary est passé peu à peu de Charybde en Scylla, avec des “petits” larcins de vols ou drogue, puis de plus en plus graves. Passages en établissement pour jeunes délinquants dont la lecture est assez insoutenable, puis la prison, et on sent la spirale sans fin qui s’amorce et l’entraîne inéluctablement. Il tue finalement les deux jeunes mormons de sang froid comme un acte final et une volonté d’en finir avec la vie. Cela se confirme puisqu’il demande expressément à la justice de l’exécuter…

L’histoire est vue par l’auteur qui a utilisé les recherches documentaires des biographes de son frère, mais aussi évidemment ses propres souvenirs et surtout ses impressions, même s’il est né plus tard que sa fratrie et n’a pas vraiment connu la même vie (son père était particulièrement “chouette” avec lui). J’ai beaucoup aimé son écriture et le fait qu’on puisse lire le livre comme un vrai roman. Et quel roman !! J’ai été happé par cette histoire et le talent de son narrateur pour nous impliquer dans son univers familial. De plus on est dans la peinture au vitriol de l’Amérique des années 50 à 80, et dans le genre “famille dysfonctionnelle” on a un exemple qui fait penser à ce qu’un Augusten Burroughs a pu puiser pour produire sa propre énergie littéraire. C’est évidemment assez triste, mais pas complètement, et je pense que le matériau est un délice de psychanalyste. Il y a aussi tout ce qu’il faut pour projeter sa propre expérience familial et ses bizarreries (Toutes les familles sont psychotiques écrivait Douglas Coupland), deviser ou disserter sur la psychologie transgénérationnelle, et voir qu’au final on peut aussi échapper à l’atavisme destructeur des siens.

Voilà un bouquin qui pourrait rentrer dans mon Panthéon, et qui m’a bien marqué…

Un long silence (Mikal Gilmore)

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