MatooBlog

Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Ça coince…

Je suis très sensible (et d’accord) à cet article de Gilda qui évoque un important changement générationnel, et les effets en sont très palpables.

J’ai de plus en plus nettement la sensation de faire partie d’une fin de génération pour laquelle :

– à condition de bosser dur ou très dur, l’ascenseur social y était, et sans forcément devoir se renier (par exemple en restant humaniste, respectueux des autres et des paroles données, non-raciste …) ;

– les parents, relativement tôt retraités, pour les éventuels gardes d’enfants pouvaient aider, ce qui n’est pas rien lors des premières années de travail alors que les salaires couvrent à peine les frais ;

– les parents s’ils avaient eu des vies professionnelles raisonnables, s’ils avaient trois sous de côté, s’ils étaient généreux, pouvaient donner le petit coup de pouce permettant, une fin d’études, un premier logement, l’attente des premiers salaires …

Je m’aperçois que nous ne pourrons en faire autant envers nos enfants. Menacés dans nos jobs passés la cinquantaine (sauf à avoir su ou voulu ou pu devenir cadre dirigeant), nous n’aurons pas de retraites avant 67 ans. Ça signifie pour beaucoup d’entre nous, vivoter avec difficultés dans des boulots précaires (et encore, si l’on a la santé) ou déclassés (au moins d’un point de vue financier). Impossible d’aider la génération suivante, laquelle est confrontée avec une forte réduction des possibilités d’études peu coûteuses, du moins dans des cursus reconnus pour des emplois. Impossible aussi de l’aider concrètement par exemple en gardant les petits-enfants, coincés entre les soins aux aînés (lesquels vivent désormais beaucoup plus vieux d’une façon générale) et le devoir de continuer à gagner sa vie jusqu’à un âge avancé. Matériellement, nous aurons peu de choses à leur léguer, nos revenus, fors ceux qui individuellement tirent leur épingle du jeu, n’ont rien à voir à boulot équivalent avec ceux de nos pères. Tout passe dans les dépenses de vie courante non compressibles.

[source : blog “Traces et Trajets” de Gilda]

Le reste de l’article figure également des propos auxquels je souscris sur la nourriture ou la santé par exemple. Je note en effet les mêmes effets dans mon cercle social, des gens qui avaient bénéficié d’une certaine aide des aïeux et qui n’en fera pas, ou beaucoup moins, bénéficier ses propres enfants. C’est du coup une lente désagrégation, et plutôt un amortisseur générationnel qui tend simplement à disparaître. Je ne mesure pas l’impact exact en termes macroéconomiques, mais j’aime bien le titre de son article “À un moment, ça va coincer” qui indique bien que nous sommes dans un schéma de rupture très progressive. On assiste pas à une cassure nette et tranchée de nos habitudes et comportements, c’est “juste” une lente usure, génération après génération, parfois même dans une vie à cause d’un accident (perte d’emploi, maladie…).

Mais un jour, ça va coincer.

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  • Ca me rappelle une discussion que j’ai eu il y a quelques temps. Etant issu d’une famille italienne, les membres de ma famille me racontaient qu’ils étaient partis, pour trouver un meilleur boulot à l’étranger, et qu’ils arrivaient (au moins tant qu’il n’y avait aps d’enfants) à aider leurs parents restés au pays, tout en ayant une qualité de vie correcte. Une génération plus tard, lorsque quelqu’un de ma génération part, toujours pour trouver un meilleur, il faut que ses parents, qui restent puissent l’aider (comme dit l’article, à condition d’être dans une situation le permettant) sinon, adieu l’étranger…

    Ca fait pas rêver…

  • Ce qui m’inquiète, c’est de voir le Matoo, d’habitude tellement marcaurélien, inquiet à ce point.

    Mais dis-toi que dans vingt ans, tu seras plus riche, plus installé, que tu auras accumulé du patrimoine, des relations, etc. et que donc tu seras capable d’aider les générations les plus jeunes. C’est évident. Et si l’écart de patrimoine entre Matoo vieux et les jeunots qui l’entourent est plus réduit qu’entre maman Matoo et Matoo jeune, c’est plutôt une bonne nouvelle : cela voudra dire que les différences de patrimoine ce seront estompés. C’est l’inverse qui serait inquiétant !

    • Oh bonjour toi ! ^^
      Je ne suis pas tant inquiet pour moi, je suis un bobo parvenu à la DINK (double income no kids), ça va je tire mon épingle… Je vois surtout mon entourage familial qui vit directement cela, et ce n’est pas drôle au quotidien.

      • Bonjour au fait ! ^^

        Et bien tu vieillis, tu te fais du souci pour les plus jeunes, c’était mieux avant, toussa, toussa. Rien de nouveau sous le soleil :-P

        Je suis un peu comme ça ! Mais je me souviens étant jeune de l’impression de décalage entre ce que les plus âgés pensaient de ma vie, et la façon dont je le vivais. Et donc maintenant, j’évite complètement de « juger » les jeunes, leur vie, etc. Ce qu’ils vivent n’est en rien comparable à nous, et nous devons comprendre leur expérience avant de leur donner des conseils.

        Mes deux sesterces marcaurélien ;-)

  • Souvent, je me demande si cette situation précédente, où l’on pouvait compter sur les parents, n’était pas une situation exceptionnelle, rare à l’échelle de l’histoire moderne.
    Mais en-dehors du ressenti (de notre pessimisme quasi génétique ;-), il faudrait observer l’évolution de la constitution d’un patrimoine et le partage des richesses (là, ça coince!)

  • En fait on hérite plus de ses parents mais de ses grands-parents. Ca pose des problèmes fiscaux (ce n’est pas prévu comme ça) et aussi des problèmes d’envahissement d’objets (non, pas besoin de draps et d’assiettes, ça fait longtemps qu’on a été obligé de s’en procurer. )

    Ce que dit Gilda est en partie juste. D’un autre côté, elle a fait un choix audacieux, digne des hippies partant dans le Larzac: sinon elle serait en sécurité en train de mourir d’ennui au chaud dans sa banque… cette paupérisation des cinquantenaires qu’elle décrit, pour des gens qui ont fait ses études, n’est pas la norme.
    Nos parents acceptaient des vies de devoir et de contraintes que nous n’acceptons plus forcément. Le prix, c’est moins de confort et de sécurité.

    Mais qui n’empêche que j’ai honte quand je me dis que je laisserais moins à mes enfants que mes parents ne m’ont laissé.

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