MatooBlog

Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Déblogage temporel

Officiellement, j’écris depuis que j’ai 15 ans, oui c’était en 1991 lors d’une colonie de vacances que j’ai commencé à écrire des trucs sur ce qui se passait là-bas. Et la première véritable trace d’écrit non lié à des devoirs scolaires, c’était même en CM2 où j’avais pris des notes lors d’une visite des ateliers de réparation du TGV (waaaaaaah !).

J’ai eu quelques années fastes où j’ai noirci des pages et des pages de cahiers de tous les genres. Peu à peu, j’ai standardisé ma manière de faire, mais le blog est un peu l’aboutissement de tout cela, en tout cas dans sa forme « publique ». Dans mes écrits privés, je suis toujours beaucoup plus sincère et intime, mais aussi parfois plus crypté car je suis seul auteur et lecteur de ces mémoires qui n’intéressent vraiment que moi (et les gens qui retrouveront cela dans une centaine d’années dans un vieux débarras ou bien dans les fouilles du Dépôt ! Arf).

Ces derniers jours, je songeais à la qualité de certains jeunes blogueurs que j’ai justement cités, et aussi au contraire aux bouses nauséabondes (mais parfois drolatiques) de jeunes « skyblogueurs et assimilés » qui se crashent régulièrement sur mon écran. J’ai aussi rencontré plusieurs autres petits jeunes dont la maturité m’a relativement confondu, et sur pas mal de domaines.

Et moi là-dedans ? Hu huhu. Mais qu’est-ce que j’étais et qu’est-ce que je pondais il y a dix ans ? Quel genre de skyblogueurs de 19 ans aurais-je donc fait ?

J’aurais pu m’imaginer déjà si mature et intelligent, mais manque de pot, il y a des traces bien tangibles puisque j’ai conservé tout cela. Je livre donc à votre impitoyable examen mon blog d’il y a dix ans… mon post du vendredi 16 juin 1995 !

Journal du 16 juin 1995 Journal du 16 juin 1995 Journal du 16 juin 1995 Journal du 16 juin 1995

Et pas d’étude de graphologie s’il vous plait, même si j’ai une écriture de pédé ! :mrgreen:

Evidemment, j’écrivais pour moi donc sans me soucier des fautes ou de tournures vraiment maladroites. On reconnaîtra déjà certains emplois de vocabulaire plus que douteux. Mon journal de l’époque se voulait un témoignage fidèle de ce que je faisais (des faits), avec qui et aussi un exercice d’introspection et de distanciation. J’avais déjà dans la tête le fait que de relire cela me permettrait de me situer, et me montrerait plus tard assez pertinemment le chemin parcouru. Je pense que j’aurais écrit différemment un texte qui aurait eu une vocation à être publié, mais cela donne un bon aperçu de mes préoccupations d’ado skyblogueur. :langue:

Qu’est-ce que je me marre aujourd’hui de ces niaiseries, c’est vraiment désopilant. Ah ces questions existentielles… Voyons voir si je décrypte un peu cela… En gros, nous étions à la fin du bac, une année après mon propre baccalauréat, et je pensais beaucoup à mes potes qui avaient redoublé et qui revivaient ce calvaire. Une première année d’IUT dans les pattes, à faire un truc qui me plaisait à moitié (génie électrique et informatique industrielle, si si si je vous assure… pas un BTS esthéticienne), et surtout un peu paumé dans une transition lycée/université. Je voyais mes amis du lycée vivre d’autres choses et nos amitiés se déliter lentement, tandis que d’autres amitiés balbutiantes voyaient aussi le jour pour moi. Mais cette transition faisait que je voyais ce que je perdais (et je ne savais pas si ça durerait ou pas) et que je n’étais pas du tout certain de ce que je récupérais.

Dans le même temps, j’avais mis fin à ma dernière relation hétéro (si si si, ce n’est pas de la science-fiction) et quelques mois plus tôt j’avais pénétré pour la première fois dans ce temple mythique qu’était le Queen pour moi. Là, j’étais certain d’être pédé, mais je me disais qu’il me faudrait faire une vraie rencontre pour ne plus avoir aucun doute et m’affirmer auprès de mes amis. Comme je le mets, à l’époque, je n’avais dit la vérité qu’à un seul pote : Bastien.

La fois d’avant au Queen, j’avais fait une rencontre, et je l’avais raconté par le menu. Je n’avais jamais eu autant de mal à poser sur le papier ce qui m’était arrivé. Décrire une rencontre avec un mec était un truc hyper difficile et j’avais peur que ces écrits soient lus par des gens malintentionnés. Aujourd’hui, je ris comme une baleine quand je relis ça. J’avais appelé le mec « Janus » parce qu’il avait « deux visages »*, d’ailleurs j’adorais tout ce qui avait trait à la mythologie (encore aujourd’hui) et j’en abusais largement dans tout ce que j’écrivais (tiens j’ai parlé d’un Daphnis dont je suis même tombé amoureux par la suite).

Mais j’avais rencontré Caro deux mois auparavant, et je pressentais de grands changements pour la suite, le début de ma vie « gay » à Paris. Je n’avais pas tort. ;-)

C’est marrant, j’ai toujours le même souci de l’écrit :

Les gens ne savent pas la masse de renseignement qu’ils perdent sur une info mémorisée, même très importante. Lorsque l’on se souvient d’un événement ancien, il ne reste que le sentiment général et quelques émotions. Par l’écrit, je peux reconstituer les moindres détails, mais aussi (et surtout) l’intensité, la particularité et la sensibilité exacte du sentiment ressenti à tout moment. Mais cela échappe vite et il faut vite le coucher par écrit sinon c’est trop tard, et on ne garde que le principal, le côté narratif et prosaïque, alors que le côté sentimental, qui est le plus intéressant, est déjà évaporé.

(Même si « sensibilité exacte du sentiment ressenti » n’est pas très joli, hu huhu)

*En fait il m’avait entraîné dans l’espèce de backroom du Queen de l’époque (si si si, y’en avait une !) et m’avait mis la main au paquet, ce qui m’avait choqué, oie blanche que j’étais alors (oui bon ok, après j’ai fait ma traînée arf). :mrgreen:

Les publications voisines

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  • J’ai ouvert la poubelle et j’ai flanqué le mien aux ordures en fac. Et je me suis ouvert une bouteille de champ pour fêter l’événement, puis je suis parti au Meurice, déjà à l’époque. Il n’y avait rien d’intéressant dans le mien de toute façon.

  • L’écrit fixe certaines choses qu’on oublierait autrement, mais il est loin d’être si fidèle, photographique et exhaustif (je dis photographique, d’ailleurs, mais la photographie elle aussi serait justiciable de la même observation) : il reste un filtre important de subjectivité, de sélection de ce qui est relaté, transcrit, donc d’oubli du reste.

    Ce n’est un modificateur, une altération intentionnelle des modalités de la mémoire.

  • Assez bizarrement je ne sais plus écrire, aujourd’hui, en dehors du clavier et du traitement de texte. Laissez moi une page blanche et j’en fais bientôt un bourbier de mots, un champ éventré sous les ratures, hérissé de flèches et de superpositions affolantes, bombardé d’astérisques, étouffé sous les renvois et les mises entre parenthèses… Impossible de tenir, dans ces conditions, un journal propre et sagement calligraphié, coulant de la plume avec facilité et justesse comme c’est le cas pour Matoo le prolixe…

  • J’adore.

    J’ai noirci moi même durant de très longues années (en gros de 14 à 22 ans) tout ce qui faisait mon quotidien d’ado puis de jeune adulte.
    J’en ai détruit une bonne partie, vraiment très personnelle sur un gros coup de cafard, il y a 10 ans et je le regrette.

    La mémoire est tellement sélective et volatile…

  • Comme moi, tu faisais partie de ceux qui écrivaient de manière atrocement pompeuse à 19 ans… Dieu merci, on guérit petit à petit !
    (Enfin, pour toi, c’est plus lent ! :boulet:)

  • C’est gonflé d’écrire, pcq c’est de l’exhibitionnisme à retardement.
    Même si tu caches ton journal bien au chaud entre ton oreiller et la taie, un jour, inévitablement, ces écrits seront lus.
    C’est pour ça qu’on écrit : pour se distancier.
    L’écrivain devient son propre lecteur, et implicitement en admet d’autres, potentiels.:book:
    Dans un blog il y a l’immédiateté, du coup c’est certainenemnt un ton plus policé;-)

  • “Une écriture de pédé”? Bin… j’en suis aussi, et si j’écrivai au moins moitié aussi bien que toi, ce serai déjà pas mal! Lol!
    Un comble quand on fait du dessin, non? :pompom::pompom:

  • ABZ> Mmmmouais, et Reiser dessine aussi merdiquement, ton contre-exemple ne tient pas…
    MATOO> [ironique] Mmm… Comme on dit dans la pub: “Je me lève et je confirme.” tu avais vraiment une écriture de pédé pleins de ronds et de déliés (mais après tout tu te cherchais encore un peu à ce moment-là…). Maintenant que tu l’es pleinement et que tu l’assumes, je demande un examen re:censure:al euh… o:censure:al euh… ecrit pour voir ce que ton écriture est devenue…

    Rigolamment,
    Dragon.Jade ;-D

  • Ah au fait, j’ai rencontré le Matoo par hasard hier soir!!! :pompom: Moi qui ne l’avait plus vu depuis 5 ans “in the real life” quand c’était mon adorable minet au mignon minois, j’ai été tout ému de revoir mon adorable matou au regard lubri.. euh.. matois.

    J’espère Matoo que tu ne tiendras pas rigueur à mon pioupiou de son accueil quelque peu euh… indifférente!? Il est assez soupe-au-lait alors…

    Interrogativement,
    Dragon.Jade ;-D

  • Ah oui, une dernière (Après promis, c’est comme pour les cigarettes: J’arrête. ;-) ). J’apprécie beaucoup la confiance que tu nous offres à nous, tes lecteurs, pour mettre ainsi au public une partie (même édulcorée) de tes émois adulescentes. J’avoue avoir moi-même un semblant de journal… en vers, des poèmes pour dégorger le trop-plein d’idées noires. Et quand je relis mes vers de mirliton, aujourd’hui encore, j’ai envie de courir me cacher sous le lit de honte. Mais je le garde pour avoir une trace de cet être étrange que je fus il y a 15 ans…

    Ta réflexion sur l’écrit et la mémoire m’interpelle. Je me suis toujours trouver horrible à voir en photo et en conséquence, je n’ai aucune image de moi de 15 à 28 ans. Peut-être celà s’applique-t-il aussi aux sentiments? Mais comment fixer correctement dans le celluloïd ou l’encre: la douleur d’un manque, le bonheur d’aimer, la haine de soi, la joie de partager, le plaisir d’un instant?

    Nostalgiquement,
    Dragon.Jade ;-D

  • Dès le primaire j’ai écrit. Des BD. Des Poèmes. Puis des rédactions de 20 pages que mes profs corrigeaient patiemment. Vers 24 ans j’ai rédigé plus sérieusement mon premier roman. Plusieurs suivront. Mais à 36 ans seulement j’ai entrepris le journal autobiographique, sans-doute le genre littéraire le plus intimement et créativement complexe. Et finalement je ne regrette pas de m’y être employé si tard : Vivre serait transformer en légende (en mythe) l’essentiel de ce que l’on a vécu.

  • Avec des lettres qui font des mots,
    qui font des lettres,
    qui font des maux… on écrit.
    On en pleure, on en rit, on lit, on relit,
    on plie, on expédie… c’est fini.
    Et on oublie toutes ces tonnes de papier froissés,
    toutes ces tonnes de lettres jamais expédiées, confisquées,
    toutes ces lettres d’amour consumées, jetées, déchirées, brûlées, envolées, tuées… au départ ou à l’arrivée.
    L’écrit ne reste pas plus que la parole,
    on sait aussi en faire de la poussière.

    Tout ce qu’on a écrit ne se dira jamais
    et tout ce qu’on a besoin de lire n’arrivera jamais.

    Et on continuera à se torturer les idées pour du papier.

  • C’est sympa de faire un peu d’empathie vis à vis des skybloggers. Il y a beaucoup à jeter mais pour d’autres c’est bien compte tenu de leur jeune age.

    Je découvre ton blog par celui de marc. Il faut que j’y plonge. Super ergonomique, style d’écriture qui fait envie. :ok:

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