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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Amok

J’ai donc vu au théâtre du Renard, en charmante et excellente compagnie, la pièce tirée du génial petit roman de Stefan Zweig : « Amok ou le fou de Malaisie » (que j’ai avec trois autre courts romans/nouvelles dans un même bouquin dont le titre est « Amok »). J’avais découvert Stefan Zweig comme la plupart des gens, en lisant « le joueur d’échec » à l’école, mais depuis j’ai lu toute l’oeuvre de cet écrivain, qui m’éberlue toujours de sa clairvoyance et de ses qualités de romancier.

Le roman en lui-même se présente quasiment sous la forme d’un dialogue entre un homme qui se fait discret sur un bateau qui le ramène de Malaisie en Europe, et un autre voyageur qui le découvre un peu par hasard. L’homme raconte son histoire à son interlocuteur car il n’en peut vraiment plus. On apprend alors pourquoi ce médecin fuit, pourquoi il est si perturbé, et on découvre l’amok qui le ronge.

La pièce est ainsi un monologue sur un décor minimaliste qui figure un bastingage de paquebot. L’adaptation a été réalisée par Denis Sylvain qui est aussi le comédien unique de cet impressionnant soliloque. Impressionnant par sa longueur (le texte est énorme) mais surtout par la tension et le rythme qu’il faut imposer pour ne pas lasser le spectateur, et aussi la difficulté d’endosser un tel rôle. Il s’agit d’un fou qui explique sa folie, d’un type qui est à la frontière de la raison, et qui de temps en temps bascule et revient pour nous livrer quelques parts de son histoire.

Le texte du roman me parait vraiment bien respecté, et on retrouve l’impression du livre tout au long du discours du comédien. Il est surtout un tel conteur qu’il nous entraîne dans un véritable film à l’aide de deux bouts de ficelle et d’un talent de comédien absolument bluffant. On se projette aisément dans ce qu’il raconte, grâce à sa narration mais aussi les lumières, et son jeu d’une force extraordinaire. Denis Sylvain semble possédé par ce texte, et il se donne sur scène avec une authenticité qui fait frémir.

J’ai pensé à la « Chute » de Camus et à cet acteur qui m’a laissé un souvenir prégnant. On y retrouve une même passion dans le jeu du comédien et le texte de l’auteur. Cela reste un plaisir dingue de voir de si bons comédiens, d’oublier à un moment qu’on est au théâtre et de voir le personnage à quelques mètres de soi qui devient plus réel que jamais.

Amok au Théâtre du Renard

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  • Comme toi, j’adore Zweig. Le seul problème que j’ai, c’est que la traduction ne respecte absolument pas les originaux. Le style de Zweig est extrèmement mal rendu, en fait, il est beaucoup plus dérangeant, moins lisse que ce que rendent les traductions. C’est donc plus accessible qu’en version originale, alors que ce que je trouvais de bien dans les oeuvres de Zweig, à la base, c’est leur accessibilité, la facon simple de dire des trucs profonds… Et ben en fait, c’est pas ca. (c’est mieux, mais c’est plus aride).
    Ah et puis en Allemand, un mec qui pète un cable ‘er läuft Amok’. Je sais pas si ca vient de Zweig, ou si Zweig s’est inspiré de cette expression… Je penche pour la première hypothèse.

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