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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Cette grenade dans la main du jeune nègre est-elle une arme ou un fruit ?

Encore un bouquin incroyable de cette collection Motifs dont les choix, la plupart du temps, me saisissent pour leur originalité et leur qualité. Là évidemment, c’est le titre qui m’a retenu dans la librairie où je l’ai acheté. Et quand on sait que Dany Laferrière est aussi l’auteur de « Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer », on comprend mieux sont goût pour les titres aussi emphatiques qu’intrigants et polémistes.

Et il s’agit bien d’un roman, mais un roman-récit avec une structure et un fond particulier. En effet, on a commandé à l’auteur un reportage écrit sur les Etats-Unis pour un magazine, sans plus de détail, et le roman décrit le parcours géographique, humain, culturel, mais aussi intellectuel et finalement initiatique de l’auteur qui va errer aux US pour se confronter à ce pays qu’il déteste autant qu’il aime. Dany Laferrière est un haïtien francophone de 50 ans, qui a vécu longtemps à Montréal, mais qui réside aujourd’hui à Miami. Il a donc réalisé cet impossible exercice de syncrétisme entre une culture française-européenne, une influence globale américaine et une origine black caribéenne, ce qui lui donne une acuité fabuleuse sur ce qu’il voit et ce qu’il vit.

Le bouquin est le résumé romancé de ses notes pendant son voyage. Cet ouvrage est donc composite, puisqu’il s’agit parfois du récit circonstancié de ses rencontres, parfois de pures réflexions philosophiques et politiques notamment sur le racisme et la place attitrée ou revendiquée du noir, ou parfois des pensées plus diffuses sur lui-même et une vision parcellaire de son introspection, ou même ses échanges avec son commanditaire et quelques autres personnages ésotériques dont on ne sait pas vraiment s’ils sont réels ou imaginaires. Le tout est servi par une langue extraordinaire, riche, intense, dynamique et irrévérencieuse. L’auteur bouscule les préjugés, dévoile les non-dits et les tabous racistes, il donne un bon coup de pied dans la fourmilière. Et on sent que même si c’est l’Amérique qui s’en prend plein la gueule, les européens et les autres ne sont pas en reste dans une diatribe enflammée qui reste émaillée d’un humour et d’un sens de la répartie assez remarquable.

Je pense que le titre n’est encore que de l’esbroufe, simplement pour faire parler de lui et en continuité avec son précédent roman. Et ce, même si, les faux-semblants et l’identité black sont des thèmes récurrents du bouquin. Il évoque d’ailleurs dès le début son histoire particulière d’écrivain rendu célèbre par un titre :

J’ai connu le succès à cause du titre de mon premier roman. Des gens qui n’ont jamais lu le livre, et surtout qui n’on aucune intention de le lire, connaissent pourtant son titre. Trouver ce titre m’a coûté cinq minutes de ma vie. J’ai pris trois ans pour écrire le livre. Si j’avais su… J’ai eu beau noircir des centaines de pages, il ne fallait que ces dix mots : COMMENT FAIRE L’AMOUR AVEC UN NEGRE SANS SE FATIGUER.

Alors je me suis dit que j’allais m’y mettre aussi, d’ailleurs j’ai trouvé un titre sympa :

« Cette pédale dans le marais est-elle une partie d’un vélo en vente au BHV rue de Rivoli, ou un homosexuel notoire rue des Archives ? »

Cette grenade dans la main du jeune nègre est-elle une arme ou un fruit ? - Dany Laferrière

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