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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Grand-Père

S’il y a un point commun entre les différentes branches qui constituent mon ascendance, c’est qu’ils ont tous été poussés à quitter leur pays par pauvreté. Ah ça, il n’y en a pas un seul qui n’était pas dans une misère noire. Mon grand-père algérien, le portugais, ma grand-mère allemande, la française… Je pensais à cela en lisant ce matin un nouveau bouquin qui évoque des travailleurs qui creusent un tunnel sous l’Hudson en 1916.

Je pensais à mon arrière-grand-père portugais que je n’ai pas connu, « Grand-Père ». J’ai toujours appelé les gens comme ma mère le faisait, or comme c’était son grand-père à elle et qu’elle l’appelait comme ça, j’ai fait de même (comme pour MaTante d’ailleurs, puisqu’elle est ma grande-tante en définitive !). Je pensais à tous ces incroyables hasards qui l’ont mené de l’Algarve à la « zone » (bidonvilles de la porte de Clignancourt).

En fait c’est tout bête. Pendant la guerre de 14-18, la France allait au Portugal, dans les endroits les plus miséreux, et offrait l’immense opportunité à des pauvres gens de s’engager dans l’armée française et ainsi d’y gagner ses galons de citoyen. Mon arrière-grand-père y est allé pour nourrir sa famille, une famille qui souffrait de la faim. Simplement, élémentairement, carrément. Mon arrière-grand-mère est donc restée au pays pendant que son mari allait se battre dans les tranchées du nord de la France. Il y fut gazé comme beaucoup d’autres.

Comme il avait de la chance, il réchappa de cette boucherie qu’on appelle la première guerre mondiale. Et il trouva du travail comme mineur de fond dans le nord. Mon arrière-grand-mère débarqua (avec sa pousse de figuier) en bateau à Cherbourg, accompagné de MaTante qui avait 4 ans (1919 donc), pour rejoindre son homme. Des tranchées à la mine… De la mine au creusement du métro parisien ! En effet, on recrutait des mineurs pour aller travailler sur paname, alors ils s’y sont rendus. Je ne sais pas exactement quand cela se passait, mais j’ai toujours entendu parler de la « zone », puisque c’est là-bas que mon grand-père (à moi cette fois) y a rencontré ma grand-mère. La « zone », MaTante m’en parle toujours comme de ses plus belles années. C’est marrant comme l’enfance se fout du cadre de vie (tant qu’on mange et qu’on dort correctement), un peu comme dans « Rafael, derniers jours » où ses enfants jouent dans les détritus d’une décharge.

Apparemment, le Grand-Père ce n’était pas un mec facile, et plutôt un connard même dans le genre. Assez violent quand il avait bu, intransigeant et… bref un homme de son époque et de son milieu culturel. Mais quelle vie… quelle existence à trimer comme un forcené pour des clopinettes, à passer d’une pauvreté à une autre, à ne pas avoir goûté à l’instruction… Je crois qu’il n’a même jamais du se demander un jour s’il était heureux.

Et tous ces hasards successifs qui vont me voir naître près d’un siècle après lui. Ces rencontres impossibles entre des gens si différents (pays d’origine, cultures, religions…) qui font que je tape ces mots, là. Un seul point commun, la pauvreté.

Le voilà mon arrière-grand-père, sacré tronche le bougre !

Grand-Père

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