MatooBlog

Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

L’Amour médecin – Le Sicilien ou l’Amour peintre

Un petit désistement de dernière minute et hop, je me retrouve à la Comédie Française, dans cette superbe salle Richelieu que j’avais étrenné la dernière fois ! En outre, apprenant qu’il s’agissait de deux pièces de Molière agrémentées de parties musicales et dansées de Lully, je n’en étais que plus motivé.

Retrouver ainsi l’ambiance de ces premiers spectacles théâtraux, musicaux et balbutiements lyriques était une expérience très intéressante et plaisante. J’ai vraiment beaucoup aimé cette idée de renouer avec ces traditions et spectacles où le Roi (Louis XIV) y dansait même en personne. Il s’agit donc de deux comédies assez légères de Molière qui incluent des parties musicales, chantées et dansées. Ces dernières étant l’oeuvre de Lully, on a alors un bon exemple des oeuvres baroques, si facilement identifiables, du compositeur. La scène présente un élément surélevé où les musiciens sont installés, et sont littéralement intégrés au décor et à la mise en scène.

Le spectacle commence par un ballet d’allégories comme la musique, le chant lyrique et certains instruments, et surtout une ode nourrie et lèche-cul comme pas permis au Grand Roi Soleil. Et puis c’est donc « l’Amour médecin » qui démarre. J’ai adoré cette comédie et ce que les metteurs en scène et les chorégraphes en ont fait. Il s’agit d’une version modernisée mais fidèle, qui remet vraiment au goût du jour la fibre humoristique qui était déjà présente dans le texte de Molière. Du coup c’est un véritable coup de fouet, c’est jeune et dynamique et réellement tordant à certains moments.

Lucinde, qui est la fille de Sganarelle, se languit car ce dernier ne veut pas qu’elle se marie avec Clitandre (la bombe : Loïc Corbery, que j’avais déjà remarqué dans le rôle de Don Sanche). A force de soupirs, Lucinde tombe malade, et son père fait venir des médecins dont le ridicule est manifeste. Lisette, la gouvernante, concocte alors une stratégie pour berner le père. Clitandre vient déguisé en médecin, et propose à Sganarelle de mimer le mariage pour redonner la santé à sa fille. Mais le faux contrat se révèle bien réel…

Cette pièce contient les personnages habituels de Molière, et surtout les médecins. Il les tourne encore une fois en ridicule, avec leurs accoutrements, leurs langages pseudo-scientifiques, leurs remèdes abscons et leurs doctes divagations. Les comédiens sont excellents et ils jouent aussi bien qu’ils dansent ou poussent la chansonnette. Ainsi une comédie aussi légère et éthérée supporte très bien l’usage du ballet et de la musique baroque. Les comédiens sont très animés sur la scène, et leur jeu même semble chorégraphié tant ils se déplacent vivement.

J’ai été épaté par la manière dont l’humour fonctionnait encore à merveille, et comme les gens rigolaient sincèrement aux pitreries des médecins (entre l’un qui baragouinait ou l’autre qui imitait Dark Vador). Le ballet soulignait tout cela avec finesse et grâce, et sans même souffrir de ses 300 ans d’âge… Brillant !

La suite devait me convaincre que cela pouvait aussi être bien raté, et que l’audace avait ses limites. En effet, la seconde comédie : « Le Sicilien ou l’Amour peintre » ne m’a pas du tout fait la même impression. Déjà le texte m’a beaucoup moins plu, et l’histoire est complètement parasitée par une mise en scène qui tourne à la commedia dell’arte bouffonne.

Un français, Adraste, veut séduire une esclave affranchie, Isidore (délicieuse Elsa Lepoivre, que j’avais déjà adoré en Infante), qui est sous le joug d’un sicilien jaloux maladif, Dom Pèdre. Adraste, aidé de son valet Hali, met au point plusieurs stratagèmes pour détourner le sicilien fulminant.

L’intrigue est déjà assez confuse et brouillonne, mais les ballets et le burlesque outrancier en font un galimatias et une suite de saynètes sans discernement. J’ai été autant déçu par cette comédie, que la première m’avait enchantée. Les décors sont très beaux par contre, et le spectacle conserve une certaine efficacité.

Donc au final, cette forme de théâtre m’a bien conquis, et l’idée de retrouver ainsi les sensations de 1680 a quelque chose de grisant. Mais bon du coup, j’aurais du me carapater à l’entracte ! (C’est drôle de retrouver les comédiens du Cid dans ces pièces-ci… Je suppose que c’est l’effet du Français.)

« Le Cid » à la Comédie Française

Les publications voisines

Post navigation

  • ça alors, moi qui avait vu ces deux petites perles la saison dernière, j’avais ressenti un peu l’inverse, et tandis que la première me laissait amusé mais un peu perplexe, la seconde m’avait absolument emballée (le jeu génial de Vamp’ d’Isidore, les parodies musicales…). Comme quoi ! ;-)

    Sinon, le petit ensemble instrumental qui accompagne ces rocambolesques facéties musicales (meuhnon je me fous pas de ton vocabulaire précieux :mrgreen: ), ce n’est rien d’autre que “Les Arts Florissants”, ou en tout cas une partie, ce très grand et très célèbre orchestre à la pointe de la reviviscence de l’art lyrique baroque en France depuis les années 80.

    Bref content que ça t’ai plu! Mais à quand l’Opéra baroque? (faudra en chosir un bien et forcer un peu Kozli!)

  • Hello Matto! J’envoie rarement des fleurs aux gens mais je dois avouer que ça fait du bien de croiser des personnes comme toi, ouvertes, curieuses et désireuses de se cultiver et de se divertir… même si le divertissement en question n’est pas sponsorisé par NRJ ou TF1 et qu’il peut avoir plus de 10 ans d’âge (opéra, théâtre, peinture et j’en passe).
    Je me sens un peu moin seul, du coup! ;-)

Répondre à Lisa Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

:sourire: 
:clindoeil: 
:huhu: 
:bisou: 
:amitie: 
:mainbouche: 
:rire: 
:gene: 
:triste: 
:vomir: 
:huhuchat: 
:horreur: 
:chatlove: 
:coeur: 
:doigt: 
:merde: 
:ok: 
:narval: 
:mitochondrie: 
:croa: