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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Un cas de conscience

Je ne connaissais pas James Blish, qui pourtant est, apparemment, un très célèbre auteur de SF américain. D’autant plus avec ce bouquin qui a remporté le fameux prix Hugo en 1959. Tout ce qu’il faut pour me plaire donc, un auteur américain des années 50-60… Eh bien oui ! J’ai adoré et dévoré cette oeuvre. Mon impression est contrastée car dans un sens il n’y a pas beaucoup de science-fiction là dedans, mais à certains égards c’est au contraire l’essence même de la SF ! J’ai donc été conquis par les projections « sociales » et « sociétales » de l’auteur, mais aussi surtout pour cette extraordinaire manière de mettre en scène la spiritualité catholique du futur, aux prises avec une question théologique fondamentale.

L’histoire commence sur une nouvelle planète découverte à 50 années-lumière de la Terre, la planète Lithia. Quatre hommes sont envoyés pour jauger le statut de cette planète et son innocuité pour l’humanité. Les avis sont partagés, certains pensent qu’il faut exploiter les richesses minières sans se soucier des habitants, mais au final le père Ruiz-Sanchez, scientifique et jésuite, a une vision toute personnelle. Il comprend que Lithia est par ses habitants, des sortes de lézards géants, et son histoire, un endroit dominé par le Malin, et une sorte de foyer de contamination démoniaque de l’Univers. Lithia est une sorte de monde tellement parfait qu’il pourrait apporter le doute de Dieu dans l’homme. Les hommes rentrent sur Terre, mais ils reçoivent en cadeau des Lithiens, un oeuf avec un de leurs congénères reptiliens qui doit grandir terrien. C’est là que ça se complique, et que l’humanité va devoir faire certains choix…

Comme je disais le bouquin est incroyable car il évoque plus la religion ou la spiritualité qu’une bonne et classique histoire dans l’espace. Mais d’un autre côté, la situation envisagée est complètement romanesque et anticipée. Cela donne un roman à l’intelligence stupéfiante, et aux ressources spirituelles extraordinaires. Il est vraiment diablement bien écrit, et donne la sensation que l’auteur s’est bien documenté sur les dogmes qu’il illustre là. On retrouve la religion catholique dans ce futur pas si lointain, toujours aussi ancrée dans notre civilisation mais plus ou moins adaptée aux nouvelles valeurs humaines. Les hommes dans les années 60 ont continué la course aux abris anti-atomiques. Et ils ont tellement pensé qu’on allait tous finir sous terre, et tellement investi, que « l’économie des abris » confine les populations dans des villes souterraines alors même que la crainte de guerre s’est dissipée. On retrouve là les anticipations des années 60 qui ont un petit goût de suranné que j’aime beaucoup aujourd’hui.

Le livre est passionnant car il permet à l’auteur de mettre en perspective les dogmes religieux chrétiens comme on ne l’avait jamais lu auparavant (et qui n’a pas été sans lui poser quelques problèmes, vous imaginez…). C’est vraiment ce que j’adore dans la SF de cette époque, les histoires, certes efficaces et haletantes, sont l’occasion de paraboles parfois assez bluffantes sur l’humanité et ses paradoxes sociaux ou religieux. Or James Blish met en place un dilemme métaphysique dont les répercussions donnent le vertige, et il mène son récit avec une véritable tension dramatique de bout en bout.

Evidemment, il faut être amateur d’une pareille forme pour apprécier le roman, mais je ne doute pas que ce soit le genre d’ouvrage qui intéresse aussi des gens versés en théologie plutôt qu’en SF. En plus, il regorge d’informations très précises sur la biologie, la zoologie, l’écosystème et les différentes composantes de Lithia, un peu comme dans « Dune », ce qui donne beaucoup de crédibilité à l’auteur dans la peinture de ce monde extraterrestre. J’aime bien ce genre de tableau précis et documenté qui tente d’inscrire l’imagination de l’auteur dans une réalité plausible, même si très souvent fantaisiste.

Un cas de conscience - James Blish

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