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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Indigènes

J’avais vraiment beaucoup aimé « Little Sénégal » qui était un petit film de Rachid Bouchareb qui avait un peu fait parler de lui à sa sortie. Et c’était déjà une oeuvre qui évoquait la mémoire des hommes, mais il s’agissait du lien entre les noirs américains, descendants d’esclaves, et les sénégalais d’Afrique. Je ne pouvais pas rater « Indigènes » qui touche particulièrement tout ceux, qui comme moi, ont des racines maghrébines.

J’ai été très agréablement surpris par l’esprit du film, par le choix de la sobriété et l’incroyable justesse de ton de Rachid Bouchareb. Il évoque les destins croisés de quatre « tirailleurs algériens » de leur enrôlement en 1943 et leur participation à la libération de l’Italie, puis de la France. Les quatre maghrébins, les quatre soldats indigènes, représentent différents profils et types d’homme. Il y a Jamel Debbouze qui est illettré et aspire à une vie meilleure. Sami Bouajila est caporal, et pense qu’il peut s’affirmer en montrant sa valeur d’homme. Samy Naceri et son frère sont des goumiers (soldats marocains de l’armée française), et Roschdy Zem pense s’en sortir ainsi, et peut-être aller vivre en France métropolitaine. Les quatre comédiens sont exemplaires, il n’y a vraiment rien à redire sur leurs prestations (évidemment je ne peux pas juger leur arabe…), et ils ont largement mérité leur prix à Cannes. Et tout de même un gros “rhaa lovely !!!” pour Mathieu Simonet (qui a en effet un air de ressemblance avec son papa, Jacques Perrin, aussi très beau gosse à son âge !)…

On découvre donc pendant ces deux heures qui couvrent les dernières années de conflit, la manière dont les « tirailleurs » des colonies ont été largement poussés dans les lignes du front, et comme « chair à canon ». Non seulement ils n’avaient pas les mêmes permissions que les autres, mais aussi pas les mêmes privilèges en tant que soldat (nourriture, vêtement, éducation), et pas de possibilités non plus d’avancement en tant que militaire. Le racisme est tangible et source d’une grande frustration. Une frustration qui bien sûr se véhicule avec d’autant plus de force aux spectateurs que nous sommes.

Le film est fort, car il est simple et intelligent. Il dénonce sans avoir recours à autre chose que les faits que guerre que nous connaissons tous, mais dont on nous a occulté une partie. Rachid Bouchareb ne fait que lever le voile sur une injustice flagrante, et une de ces attitudes dont la France peut largement rougir de honte. On comprend aussi bien que le sentiment indépendantiste n’a pu qu’être renforcé par des inégalités pareilles. Les quatre personnages sont éminemment touchants dans leurs destinées et aspirations. Ils représentent les dizaines de milliers de soldats anonymes, jusque dans les livres d’histoire, et l’émotion est très justement distillée pendant tout le film.

Il y a bien quelques maladresses, et quelques éléments du scénario qui tombent un peu à plat pour moi (notamment le lien avec les femmes…), mais en gros c’est un excellent film. Et puis c’est une oeuvre importante pour la mémoire de ces anciens combattants de l’ombre, ces hommes qui ont été considérés jusqu’au bout comme des citoyens de seconde zone. Ce n’est pas non plus un film qui met le feu aux poudres, mais qui simplement nous ouvre les yeux avec légitimité et authenticité.

L’avis des copines : Nij, Niklas, [elle], Mathieu.

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  • Je n’a pas vu le film de Rachid Bouchareb mais étant donné qu’il a lancé un débat et participé à l’accélération du dossier concernant les pensions versées aux derniers anciens combatants auxquels nous n’avions pas accordé la nationalité française, j’ai eu l’occasion de lire pas mal d’articles sur le sujet.
    Un dossier de l’Express, en particulier, revient sur la façon dont la France a traité ces combatants.
    Un polémique avait eut lieu portant sur l’expression “chair à canon” pour désigner ceux dont nous nous serons servis de façon lâche.

    Voir : Le vrai visage des tirailleurs

    http://www.lexpress.fr/info/societe/dossier/colonisation/dossier.asp?ida=451694

    Je pense qu’il est nécessaire de reconnaître la participation des tirailleurs et réparer dans la mesure du possible les erreurs qui ont pu être commises commises. Mais il ne faut pas attiser la rancoeur.

    Sinon, je lis régulièrement ce blog que j’apprécie pas mal.
    Merci

  • Le film était nécessaire, il a ouvert un débat, Bernadette a pleuré, tout cela est très bien, j’en conviens.
    N’empêche, je me suis fait assez chier pendant, et, le comble pour un film épique, j’ai trouvé plusieurs scènes ridicules.. je sais, je suis un ignoble insensible.
    Heureusement, on voyait les pecs de Roshdy Zem :redface:

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