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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

La curée

Je n’ai pas trop l’occasion de lire des classiques, et pourtant c’est naze car on s’est en général contenté de respecter (peu ou prou, Balise ou Profil d’une oeuvre aidant…) la sélection du programme scolaire. Donc on a eu sa part de Zola, Flaubert ou Balzac, mais on est peut-être passé à côté de bouquins géniaux, qui ont le malheur d’être un peu daté. A la base, je suis féru de romans contemporains, mais comme on m’offre souvent des livres (et que je les lis tous !), il m’arrive de corriger quelques unes de ces lacunes. La dernière fois, c’était un Flaubert, et là c’est un Zola.

J’ai lu quelques uns des Rougon-Macquart, comme « La Terre », « le Rêve », « Germinal » ou « Au Bonheur des Dames », mais il y en a 20 !!! Et mes amis ont souvent été marqué par des « épisodes » différents de cette hallucinante saga qui couvre toute la période du Second Empire, avec « Nana », « La Bête humaine » ou encore « L’Assommoir ». J’ai adoré les romans que j’ai lus de Zola, je trouve son style superbe, et ses histoires sont toujours terriblement tragiques et marquées du sceau du destin (et de cette fameuse hérédité familiale). Mais surtout il décrit les « réalités » de son époque, qu’elles soient politiques, économiques, industrielles, rurales et sociales.

« La curée » se déroule en plein Second Empire, elle décrit les grands travaux de Paris et les fameux bouleversements Haussmanniens. Mais surtout, le propos est basé sur la spéculation immobilière et les gens qui se sont enrichit sur cette extraordinaire « bulle financière ». En effet, l’éradication des vieux immeubles et la construction des grands boulevards à remodelé complètement Paris, et certains s’en sont mis plein les poches. C’est le cas d’Aristide Saccard (frère du Ministre Eugène Rougon) qui profite de son travail à la mairie pour racheter une poignée de pain des immeubles qui vont se faire abattre, et ensuite se les faire indemniser à prix d’or en truquant les enquêtes. Il fait aussi construire des maisons superbes sur ces nouveaux boulevards, dont le prix du terrain prend des valeurs qui atteignent des sommets.

Le contexte est donc celui de l’argent facilement engrangé, et pas toujours de la plus honnête manière, mais aussi de toute cette clique bourgeoise et « nouveau-noble » qui gravite autour de ces « dépeceurs » de Paris. Aristide est remarié à une femme plus jeune et très belle : Renée. Cette dernière a l’esprit fantasque et ne rêve que de la belle vie, ses toilettes, ses bijoux, ses sorties mondaine et son « standing ». Les époux vivent une relation purement platonique, et ne se gênent pas pour avoir des amants. Mais il se trouve que c’est Maxime, le jeune fils d’Aristide, qui arrive un jour dans le lit de Renée, sa belle-mère. Cette passion semi-incestueuse aura bien des conséquences sur l’équilibre de la fragile Renée…

Evidemment le roman fourmille de ces descriptions minutieuses qui ont fait la marque de fabrique de Zola (ou de Balzac !). Je ne suis pas toujours fanatique de ces textes à rallonge qui donnent des précisions millimétriques des décors et situations. Mais concernant Paris, j’ai été particulièrement sensible à la manière dont Zola personnifie la ville, et en montre vraiment le charcutage dans ces travaux pharaoniques.

Enfin l’intérêt du bouquin réside principalement, à mon avis, dans le personnage de Renée, et dans la description de cette vie mondaine. Je suis à chaque fois épaté de lire comment Zola décrit le sexe dans ses bouquins. Il a cette manière de parfaitement faire comprendre les choses les plus crues et indécentes tout en restant dans un niveau de littérature bluffant. En outre, il évoque là de manière limpide des relations homosexuelles (gays ou lesbiennes) avec une liberté stupéfiante (pas de censure à l’époque ?). Les portraits psychologiques qu’ils dressent de ses personnages sont souvent un peu trop caricaturaux ou « clinique », mais il met alors en scène avec beaucoup de talent de véritables allégories psychanalytiques.

Donc je suis encore une fois conquis par la modernité de cet auteur, et donc par son incroyable intemporalité, même si finalement ses écrits n’ont qu’un peu plus d’une centaine d’années. Cette description du passé, qu’elle soit morale ou économique ou encore politique, montre bien à quel point les faits ne font que se reproduire, toujours et encore. En effet, on peut facilement identifier les gens, les attitudes et les fonctionnements de l’époque à aujourd’hui. Et cette fatalité, ou ironie du sort, me rend toujours aussi songeur (et désespéré).

La curée - Emile Zola

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  • La légence (ma mère) dit qu’à l’âge de 12 ans, je suis passée du Club des 5 à Germinal.. A la fin de ma lecture, je me souviens l’avoir immédiatement relu. J’ai également dévoré Au bonheur des dames (lu, relu, rerelu), Pot-Bouille, Nana, le Ventre de Paris and co.. et j’avoue n’avoir jamais lu la Curée. Et comme souvent.. non ..en fait comme d’habitude, tu m’as donné envie! Demain, direction la Fnac. L’élégance du hérisson attendra.)

  • Dans le genre, je te conseille ‘Le ventre de Paris’ Zola y parle des Halles de paris de façon magistrale comme d’habitude, j’ai adoré.

  • Ton billet me fait me souvenir d’une anecdote. Mon grand père m’a raconté le remontage de bretelles auquel il avait eu droit de la part de sa tante quand il était descendu du train un livre de Zola à la main… Eh oui, sulfureux tout de même :mrgreen:

    J’ai lu toute la saison, seul “le rève”, m’a gonflée (mais vraiment gonflée).

  • dans mon top 3 des livres de Zola à-moi-que-j’ai, il y’a “Au Bonheur des Dames” (l’émergence des grands magasins), le “Ventre de Paris” (le monde des halles) et “l’Assomoir” (le petit peuple de paris). :book:

  • Ah très bon la Curée, effectivement, et assez différent des clichés souvent énoncés sur Zola (le naturalisme, les grandes descriptions, etc.) puisque ce roman est véritablement poétique et symboliste par moments (et quels moments !).
    Impressionant aussi cette façon d’associer trois axes a priori inconciliables (le destin tragique de Renée la nouvelle Phèdre, les boulversements d’Haussmann et toute la symbolique florale. Superbe ;-)

  • Au programme de mon bac de français… :book: On l’avait donc décortiqué en long, en large en travers… J’avais fait une étude sur le Paris de Haussmann, les nouveaux boulevards taillés dans la ville, les terres retournées (la mauvaise terre recouvrant la terre fertile pour différentes buttes, etc…). Je n’avais encore jamais mis les pieds à Paris, mais c’était passionnant, surtout avec les descriptions quasi-scientifiques de Zola…

  • Zola est mon auteur préféré pour toutes les qualités que tu cites et en particulier pour sa description de la France du Second Empire. Je lui pardonne tout, même ses descriptions un peu longue parfois. Le plus impressionnant est l’énergie et le travail qu’il a mis derrière ce projet titanesque que représente la saga des Rougon-Macquart. J’ai lu les 20 ouvrages de cette série (je n,en suis pas peu fier). J’avais commencé par Au bonheur des dames au collège comme beaucoup. Mais c’est L’Oeuvre, que j’ai lu au lycée qui a déclenché ma passion. Zola y rend compte des difficultés rencontrées par les peintres non académiques qui finissent par monter le Salon des Refusés. On y suis en particulier le peintre maudit Claude Lantier. C’est tout simplement brillant et ça donne envie de lire les autres, forcément…

  • Une légende familiale veut que mon arrière grand-mère, qui était fort volage, ait eu une liaison avec Zola, lequel était grand amateur de jupons. Des lettres prouveraient cette idyle.

    Bien sûr, je ne les ai jamais vues. Pourtant, j’entretiens encore l’espoir d’être le descendant de l’illustre.

    On tire sa gloire d’où on peut… En tout cas, être l’arrière-petit-fils d’une bourgeoise de province qui montait à Paris pour s’envoyait en l’air, puisque ça au moins c’est avéré, ça me convient bien ;-)

  • Psssst :lol: si tu as aimé, mets deux “aime” à “l’assommoir” (ou je me trompe ?). Tiens je vais relire du Zola, merci pour l’idée !

  • Ce qui m’étonne toujours, c’est la régularité de métronome à laquelle ces romans ont paru à l’époque et la constance (qualitative) avec laquelle ils ont été écrits (c’est pas Amélie Nothomb qui pourrait en dire autant hi hi). “La Curée” est un tableau extraordinaire du Paris haussmannien et c’est probablement l’un de mes préférés des Rougon-Macquart.

    La semaine dernière, à court de poches, je me suis remis au turbin avec “La Bête Humaine”. Zola ne m’a jamais déçu (mmh à part peut-être “Son Excellence Eugène Rougon” :doute:)

  • :-) interessant ! cette analyse va m’aider un peu pour mon travail sur l’oeuvre … néanmoins je voulais vous questionner sur l’oeuvre de zola : germinal … comment l’avez vous trouvée ??

  • salut , moi j’ai du lire la curée ,je trouve que il est assez difficile a comprendre et a analysé quand on est en seconde ! Je voudrais juste que vous m’aidez pour une question :

    En quoi la Curée de Zola est-il un roman naturaliste ? :help: svp :)

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