J’avais beaucoup aimé le soleil des Scorta, dont j’avais parlé ici-même. Et on m’avait surtout conseillé de lire ce bouquin là, considéré comme un chef d’oeuvre de Laurent Gaudé. Je crois même que c’est Vincent qui me l’a acheté pour mon anniversaire celui-ci !
« La mort du roi Tsongor » est assurément un grand roman, un livre qui possède d’innombrables qualités dans le fond et dans la forme. On retrouve la plume exigeante et ensorcelante de l’auteur, mais aussi une histoire qui nous emmène très très loin dans des aventures oniriques et exotiques. Et puis c’est un petit roman philosophique aussi, qui sous couvert d’une intrigue qui s’apparente à un conte, nous donne aussi une leçon de vie.
Nous sommes en Afrique à priori, mais ce n’est jamais précisé, et c’est il y a longtemps, au sein d’une civilisation millénaire et puissante, dont le roi Tsongor est le monarque craint et respecté. Ce dernier a conquis et pacifié un gigantesque royaume, et il a enfin instauré une sorte de “pax romana” qui permet à ses peuples de prospérer. C’est un grand jour, car sa fille, Samilia, va épouser le prince Kouame, et toute la capitale, Massaba, est en fête. Mais voilà que débarque Sango Kerim, un ami d’enfance élevé par le roi, et qui avait fui à l’adolescence. Il vient à la tête de son armée et de sa fortune, et il veut épouser Samilia en respect d’une promesse de l’enfance. Tsongor est catastrophé car tous les chemins ont l’air de conduire à la guerre. Du coup, il décide de mourir, et de faire réfléchir les siens à son geste. Tandis que le plus jeune fils part construire des mausolées à la gloire de son père pour respecter sa mémoire, la guerre commence entre Kouame et Sango Kerim. Ils veulent tous les deux épouser Samilia, et les fils de Tsongor se disputent déjà le trône…
J’ai pensé à pas mal de bouquin quand j’ai lu celui-ci. Il y a comme un air de « l’Alchimiste » mais c’est beaucoup moins niais et cul-cul (à mon avis), et on retrouve aussi les superbes descriptions et l’aventure antique d’un « Salammbô ». Et surtout, je trouve que Laurent Gaudé a écrit là une tragédie dans la lignée de Sophocle. Toute une mécanique se met en place, chaque personnage a l’air d’avoir un destin écrit, et inexorablement tout se précipite dans la tragédie et de drame. Je ne suis pas surpris que le bouquin plaise à tous et à des jeunes gens, parce qu’il est facile et agréable à lire, à la fois distrayant, dépaysant et pas chiant du tout. Mais l’épaisseur psychologique des personnages m’a vraiment surpris, c’est un récit riche et sensible, une narration belle et sensuelle.
Voilà un bouquin qui deviendra sans aucun doute un classique, s’il n’en est pas déjà un, et un Laurent Gaudé (putain le salaud, il est né en 1972) qui est drôlement doué.
C’est bien moi qui te l’ai offert ;)
Content qu’il t’ait plu, c’est un de mes livres de chevet.
“Il y a comme un air de « l’Alchimiste » mais c’est beaucoup moins niais et cul-cul ” : Heureusement qu’il y a le mais, sinon, ça cassait définitivement le livre :-)
Ce roman a figuré ces deux dernières années dans des listes de livres que je propose à mes élèves (15-17 ans). J’ai eu des retours passionnés, il ne laisse pas indiffrent, on l’aime ou on le déteste. Il plaît davantage aux garçons, certaines les filles le trouvent trop violent. En plus, c’est une histoire d’hommes, de fidélité du fils au père, la fille n’est finalement que celle par qui le scandale arrive, puisqu’elle a deux prétendants… alors que toute la question de la fidélité au père sert de fil conducteur.
Gaudé fait quelques descriptions cruelles et sanguinaires qui peuvent choquer les âmes sensibles (dont moi).
Je suis d’accord avec toi quand tu dis que ce sera un classique de demain, il a une force intemporelle et il est quand même bien plus dérangeant que Le Soleil des Scorta.
(Pour info, Gaudé vient de publier un nouveau roman, “La porte des enfers” (Actes Sud)
« J’ai écrit ce livre pour mes morts », confie-t-il dans la postface – ces proches disparus avec une part de lui-même. Penser très fort à eux les fait rester un peu vivants. Combattre la mort, ne pas lui laisser le dernier mot… c’est peut-être le plus beau combat de l’homme. Entre conte macabre et fable naïve, « La Porte des enfers » est une invitation à vivre sans entraves. Un livre à réveiller les morts. (http://www.lesechos.fr/info/loisirs/4759223-reveiller-les-morts.htm)
Je l’ai lu il y a un moment (les 50 premières pages environ), et bizarrement je n’ai pas accroché. Je vais peut-être réessayer… ;)
Comme Samantdi, j’ai dévoré la porte des Enfers et sa descente au Styx. Un livre émouvant, jamais sombre et qui incite à essayer de se débarrasser des épines qui enfoncées dans la chair, nous font souffrir et faire souffrir autrui.
Une très belle philosophie. Je te le conseille vivement
“LA mort du roi Tsongor “est décidement un trés beau livre sur l’apprentissage de la honte :eek: ;-) Il est aussi trés riche en intertextualité et agréable a lire . Je le recommande vivement