MatooBlog

Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Le début et la fin

Le début c’était samedi dernier, ce fameux déménagement. Ouf, ça y est, on a réussi. Après pas mal de stress (surtout pour la location d’un gigantesque bahut assortie d’une toute aussi pachydermique caution), d’énergie et d’huile de coude de la part de plein d’amis, nous habitons dans notre nouveau « chez nous ». J’ai du en effet intégrer le théorème suivant : « chez moi » + « chez lui » = « chez nous », qui est plus d’ailleurs un axiome digne d’Euclide tant il est basique et tombe sous le sens (mais la géométrie non-euclidienne ça marche aussi, hé hé).

Me voilà donc dans un quatrième appartement parisien en bientôt 11 ans. J’ai emménagé à Paris le samedi 31 janvier 1998, c’était près de Bastille, puis il y a eu Nation, et Goncourt, et voilà Ménilmontant. Mais toujours et encore le 11ème, les limites du 11ème même, puisque j’ai toujours été en périphérie de cet arrondissement que je chéris tant. 129 boulevard de Ménilmontant, nan mais est-ce que ça fait pas parigot ça comme adresse hein ?!!

L’appartement est exactement comme je l’avais vu et apprécié au premier coup d’oeil, et ça aussi c’est un sacré soulagement (vu qu’il me coûte un bras par mois !!!). Nous avons mixé nos affaires sans problème, et même si j’appréhende un peu la cohabitation, je crois que A. est très motivé pour que ça se passe très bien. Il faut juste que je mette un peu d’eau dans mon vin. Et surtout surtout surtout ne pas succomber à la tentation ultime : me comporter comme ma mère, et exactement avec A. comme s’il était mon père. Ah là là, les schémas familiaux c’est complètement dingue comme on en est le jouet, et c’est un jeu aussi pervers qu’atavique. Heureusement en avoir « pleinement » conscience permet aussi de déjouer mes propres mécanismes d’autodestruction.

Les meubles ont timidement pris place mais seront bougés ou ajustés, de même que les tableaux et photos commencent à orner les murs nus. La chambre est immense et je suis fan de son parquet peint en blanc, tandis que je voue un culte totalement animiste à mon lave-vaisselle. La seconde chambre est pleine du bordel qui n’a pas encore trouvé sa place, dans l’appartement, la cave ou la poubelle, mais nous nous laissons aussi un peu de temps pour nous installer. Je suis très très content du quartier qui a une concentration en commerces assez bluffante, et qui a l’air d’être un mélange popu-prolo-bobo-parigot assez agréable à vivre.

Plein de bonnes choses donc, et comme il faut bien rééquilibrer ces choses, alors que j’emménageais, ou plutôt que j’ahanais en transbahutant les trente cartons dans lesquels j’ai fait rentrer toute ma vie, ma grande-tante, MaTante, était en train de rendre l’âme. Lorsque j’ai eu un coup de fil de ma mère, j’ai cru qu’elle voulait avoir des nouvelles du déménagement, mais mon frangin m’a confirmé quelques minutes plus tard que notre grande-tante était morte.

Je l’avais évoquée dans un post récent, mais quelques lecteurs assidus se souviendront de pas mal d’articles en relation (comme sa manière de prononcer Sarkozy en Swarovski, ou bien le jour où elle a pensé que sa télé était cassée car elle affichait sans arrêt 110… le jour du Sidaction, etc.). Je suis très triste de ne plus jamais la voir en vie, mais aussi soulagé de ne plus la voir si hagarde et malheureuse dans son lit d’hôpital. Elle commençait sérieusement à péter un boulon, et a rapidement décliné lorsqu’elle a compris qu’elle ne pouvait plus habiter chez elle, et devait se résoudre à la maison de retraite médicalisée. Les derniers temps ont été plutôt pénibles pour tout le monde, mais je suis content de l’avoir vu une dernière fois le 31 décembre.

J’ai encore été un peu agacé par l’attitude de mon frère et de mes parents à l’hosto. Ma mère a continué à jouer son jeu de Candy Neige, en prenant à coeur son rôle de Sainte-Martyr qu’on sacrifie sur l’autel familial de la Perpétuelle Fatalité. Je sais que je suis un peu dur, car ils sont allés la voir, mon père et ma mère, presque tous les jours depuis trois mois qu’elle était alitée. Mais lorsqu’elle a commencé à yoyoter, ils n’osaient rien dire, ou bien ils étaient complètement gênés. J’étais le seul à lui expliquer calmement et à répéter autant de fois qu’il faudrait (même si c’est complètement inutile) qu’elle avait des hallucinations parce qu’elle ne se nourrissait plus et que c’était normal. Mais qu’elle devait manger et boire, car elle retrouverait ainsi ses esprits. Quand elle demandait à rentrer chez elle, je lui disais que c’était impossible, et qu’elle ne pourrait plus, à moins qu’elle se retape assez (en remangeant…).

Et puis surtout je lui ai parlé, de tout, de rien, de tout ce qui me passait par la tête. La dernière fois notamment, alors que nous étions tous les quatre avec elle, et que nous la rassurions. C’était la fin, elle était sous morphine pour éviter la douleur, et pendant une bonne demi-heure inconsciente. Elle s’est soudainement réveillée, et son regard a fluctué tout en lançant de temps en temps quelques éclairs de lucidité. Pendant ces cours instants, elle nous regardait, et je pense qu’elle nous reconnaissait. Evidemment c’est choquant, mais il faut penser avant tout à elle. Et donc j’ai évité d’avoir l’air embarrassé, et j’ai lutté contre le mutisme ambiant. Je lui ai parlé du jour de l’an, de 2009 qui allait arriver, de la chambre avec A. en rigolant, de la soirée à laquelle j’allais, du fait qu’on était heureux d’être là tous les quatre pour la voir, que nous étions contents de la sentir bien vivante et parmi nous, pour qu’elle sache qu’on était là pour elle, avec elle.

Elle s’est rapidement rendormie, et je suis reparti sur Paris. Quelques jours après, c’était fini. 93 ans, une vie bien remplie et une certaine lassitude chez elle, font que je ne suis pas vraiment triste. C’était inexorable, et il valait mieux qu’elle parte. Mes parents sont sous le choc, ils ont aussi réalisé que MaTante était la dernière personne âgée de la famille, et qu’ils étaient les prochains…

Il me reste des photos, des souvenirs et une kyrielle d’histoires à raconter sur MaTante. Elle restera forcément en moi toute ma vie.

Bon c’est pas tout, mais il faut accrocher les tableaux aux murs.

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