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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

« Dans la colonie pénitentiaire » au théâtre de l’Athénée

J’ai déjà dit tout le bien que je pensais de Philip Glass dans maints articles, et j’avais vraiment adoré son adaptation des Enfants Terribles dans ce même théâtre. Cette forme d’opéra moderne n’est pourtant pas vraiment ma tasse de thé (moi qui suis carrément plus Bel Canto et opéra de concierges), mais il faut dire que la musique de Glass avec une mise en scène efficace et des interprètes convaincants avaient fait l’affaire.

Nous sommes dans une forme quasi-identique pour « Dans la colonie pénitentiaire » qui est une nouvelle (In der Strafkolonie, écrite en 1914) de Franz Kafka assez cryptique. Le livret reprend l’histoire de manière assez précise, nous voyons donc un visiteur qui se rend sur une île, sorte de bagne, où les prisonniers subissent la torture d’une machine très complexe et dont l’unique objet est de faire souffrir jusqu’à la mort (notamment en inscrivant dans la peau la nature du crime). C’est un officier qui présente son principe au visiteur, et lui fait une démonstration sur un prisonnier. Il explique sa fascination morbide pour cette ignoble machine. L’officier demande au visiteur de témoigner positivement sur ce procédé auprès du commandant de l’île. Le visiteur est ulcéré par la démonstration, et l’officier comprenant que c’est la dernière fois qu’il utilise cette machine, il se fait subir la torture…

Le décor, la manière de chanter et la mise en scène même sont assez proches de l’autre spectacle donc, mais l’histoire est tellement différente qu’on ne peut pas les comparer plus. La nouvelle de Kafka est en elle-même porteuse de tellement d’idées et de sous-entendus choquants que l’on peut difficilement rester de marbre. Le plus difficile dans cet opéra consiste à rendre la complexité de la machine et à rendre palpable par la musique et la constitution de l’objet toute l’atrocité de son procédé. Cela se fait avec beaucoup de finesse en montrant le montage successif des pièces qui constituent la machinerie, et surtout des herses et pales qui vont écrire dans la peaux des suppliciés. Évidemment tout cela est imagé et métaphorique, mais assez élaboré et mis en scène pour que cela fonctionne.

J’ai bien marché sur toute la première partie jusqu’à la démonstration de la machine sur le prisonnier. En effet, c’est un moment plutôt terrible et vraiment bien rendu par la musique qui fait littéralement trembler le théâtre à cet instant funeste. Mais globalement, je suis un peu déçu par l’opéra. Je trouve qu’il n’y a pas grand chose dans les rapports entre les personnages (mais ce n’était pas non plus le fort de la nouvelle) et que le propos éminemment politique ne reste finalement qu’effleuré. En outre, lorsque la machine s’emballe et lors du suicide organisé de l’officier, j’ai trouvé que la musique et les chants manquaient d’énergie et de ce souffle énorme qui nous avait terrassé lors de la démonstration.

Du coup, je reste un peu sur ma faim et pour une fois pas convaincu par mon idole. Malgré tout l’ensemble est une œuvre qui tient la route et que j’ai eu plaisir à voir et écouter. C’est juste, qu’encore une fois, j’attendais un peu plus une œuvre d’une densité émotionnelle égale aux Enfants Terribles. Mais je sais bien que les œuvres d’origine n’ont rien à voir, et que j’ai certainement plus un problème avec la nouvelle de Kafka. Hé hé hé.

Dans la colonie pénitentiaire au Théâtre de l'Athénée de Philip Glass - Franz Kafka

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