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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

TENET (Christopher Nolan)

Attention : Impossible de ne pas parler du film sans peut-être en dire beaucoup trop pour certains, donc même si je ne vais pas divulgâcher réellement (oh si au final, ne lisez pas, mouahahahahaha), les gens les plus sensibles au “spoil” devraient passer leur chemin.

Christopher Nolan est un immense réalisateur et auteur qui s’est imposé avec de curieux films taxés de “blockbuster intelligent”. C’est à dire que ce sont étonnamment des films qui font également énormément d’entrées et sont populaires, mais également bien réalisés, à la photo léchée, aux intrigues un peu complexes et souvent inspirées. On y reconnaît aussi de plus en plus des gimmicks et obsessions de Nolan qui sont déclinés dans des genres très différents. On a eu entre autres le film de super héros, le film d’actions, le thriller psychologique, et là très certainement le film d’espionnage à la James Bond.

Le principe du film, et une sorte de clef de lecture, repose sur le titre en palindrome, et sur cette petite, mais aux énormes conséquences, notion de science-fiction consistant à considérer que le temps s’écoule classiquement, mais qu’il est aussi possible dans le futur de modifier l’entropie des choses afin d’inverser l’écoulement du temps. Un des éléments rapidement révélé dans le film est qu’on commence à retrouver aujourd’hui des artefacts inversés, qui ont donc remonté le temps (à la même “vitesse” que notre monde) et nous parviennent aujourd’hui. Nolan utilise en clin d’oeil le “carré SATOR” qui est un carré antique (romain) avec des palindromes.

Le carré SATOR de la ville d’Oppède

On va retrouver ces mots dans des noms de personnages, d’entreprises ou de lieux qui sont centraux dans le film.

Et le film ? Bon disons grosso modo que John David Washington (qui est très beau, comme son papa Denzel, et joue plutôt pas mal du tout) est notre James Bond, et qu’il est drôlement fort et couillu dans le genre. Il est repéré et engagé pour éviter une 3ème guerre mondiale qui a lieu entre les générations du futur qui nous en veulent pour avoir rendu la Terre totalement toxique et inhabitable. Leur idée c’est à la fois de renverser l’ordre du temps et de “vivre à reculons” (donc sur une planète de plus en plus saine), et de se débarrasser de toute l’humanité du passé pour leur faire de la place.

Pour contrer ce sort funeste, notre héros va suivre la trace d’une munition “inversée” et remonter jusqu’à une indienne trafiquante d’armes Priya, et un certain M. Sator (brillamment interprété par Kenneth Branagh qui est carrément glaçant par moment) qui est originaire d’une ville en Russie où il semblerait que convergent tous les intérêts. On confie rapidement au protagoniste principal (dont on ne connaît jamais le vrai prénom/nom, je me demande d’ailleurs pourquoi) un “side kick” en la personne de Robert Pattinson, et ce dernier est vraiment excellent dans ce rôle.

Evidemment il y a une femme dans l’équation, en l’occurrence la femme de Sator, mais même si on sent une immense attraction et une relation complexe, il n’y a pas vraiment de conclusion amoureuse dans un quelconque sens. C’est de plus en plus le cas dans les blockbusters, et c’est très bien qu’on puisse faire des films sans ce genre d’intrigue, ou alors sans les sempiternels clichés et scènes de sexe qui n’ont pas changé depuis “Top Gun”.

Tout le long du film, il y a des glitchs, de vrais bugs dans la matrice, soit des interventions de mecs à l’envers dont on ne comprend pas vraiment l’intérêt dans la narration, soit des choses curieuses et inexplicables mais qui ne sont évidemment pas creusées sur le moment. Et puis parfois c’est le summum, on est à l’endroit et des trucs à l’envers (des gens qui se tirent dessus par exemple, ou bien qui conduisent, ou qui même se parlent) arrivent en même temps. Certains passages peuvent devenir très très difficiles à comprendre, notamment une scène d’échange entre Sator et le héros, et surtout la baston finale avec des bombes à l’endroit, à l’envers, et des mecs qui tirent dans tous les sens, et dans tous les sens !!

Et puis hop, on voit que nos héros ont besoin de remonter le temps, donc ils passent dans une sorte de tourniquet qui les inverse, et ensuite en étant dans une combinaison confinée (ou une tente) ils peuvent vivre à reculons. Et on voit que la seconde partie du film, c’est un mélange de la première partie mais jouée à l’envers, avec nos protagonistes qui interviennent. Et donc les glitchs de tout à l’heure : c’était eux-mêmes lors de leur réintervention dans leur passé. Comme le dit Pattinson : Tout qui se doit arriver, arrive. La scène finale présente même un usage original et fou de cette technologie : c’est une attaque en étau. C’est à dire que une équipe fait la mission, puis est inversée à la fin pour pouvoir raconter tout à la seconde équipe et les aider sur le terrain (reconnaissance des lieux, armements, stratégie de l’ennemi). La seconde équipe croise donc la première mais inversée.

L’idée du film est vraiment géniale, et ça m’a plu de me triturer les méninges pour bien comprendre les choses. J’y suis allé une seconde fois pour vérifier que tout était particulièrement bien ficelé. Mais une fois suffit pour apprécier l’histoire et comprendre le sens global. Donc le film est selon moi assez brillant sur le terrain de l’action, du suspense, avec un montage et une musique spectaculaire, et un rythme tout à fait haletant. Là où le bât blesse néanmoins, c’est qu’une fois qu’on a bien compris ce micmac temporel ou entropique, eh bien la trame est finalement plutôt fine, et assez banale… On a l’impression qu’il était tellement compliqué déjà de faire le film “techniquement” que l’on a perdu sur la finesse des propos, sur les sentiments et sur les messages du film. On a compris le fin mot avec le futur qui se venge du présent pour des raisons notamment environnementales, mais c’est assez mince, et j’aurais adoré en savoir plus ou avoir plus de matière, plus d’exploration sur ce sujet et sur ces “générations futures” qui sont évoquées. Il y a aussi quelques scènes qui restent, malgré la prouesse, vraiment impossibles à bien saisir, et donc ça fait notamment une bataille finale très longue, véhémente et très confuse.

Je pense que c’est malgré tout un excellent film, qu’il met encore bien en valeur les talents formels du cinéaste Christopher Nolan, et que l’idée sous-jacente est délicieusement alambiquée et superbement mise en image, tout en reposant sur des principes scientifiques pas trop débiles. Enfin c’est super bien joué, et très divertissant, on est encore vraiment dans un blockbuster de bonne facture, malgré ce petit bémol sur l’histoire (en comparaison à la profondeur d’un Inception ou Interstellar).

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  • Après revisionnages multiples. La séquence finale est toujours aussi bordélique à suivre pour pouvoir être appréciée à sa juste valeur et l’intrigue, très simple effectivement, ne donne jamais l’impression d’être aussi simple que cela, la faute à une narration visuelle pas toujours judicieuse.

    Et je persiste et signe : le rythme du film étant bon, (j’ai réussi à le re-regarder 3 fois en ligne depuis ma séance au ciné, c’est donc qu’il n’est pas totalement rasoir non plus) Nolan aurait gagné en clarté en ajoutant une demi-heure de film dont 3 minutes d’explications entre les personnages.

    (Purée la vitesse avec laquelle la femme de Sator accepte la possibilité de remonter le flux du temps sans se faire le moindre noeud au cerveau est juste hallucinante)

    Bref, j’en suis de moins en moins content à chaque visionnage. On est loin de Inception (Concept bordélique mais parfaitement exécuté) et Interstellar (Idée de génie, conclusion en eau de boudin) et dans le genre rapport compliqué à la temporalité et narration twistée, j’ai, de loin, préféré, en son temps, Memento !

    • Je suis assez d’accord avec toi, mais y’a un petit truc qui me fait y tenir un peu tout de même. Je ne boude pas mon plaisir quoi, surtout avec les blockbusters débiles qui jonchent les rues.
      :croa:

  • C’est une utilisation intelligente du concept de non linéarité (ou plutôt de non écoulement dans un sens unique) du temps. Mais honnètement, quand on a suivi tout les doctor who avec les lignes de temps complétements effacé par des nouvelles, je trouve que TeneT est bien simple à suivre :huhu:

    • Ah ah, j’ai entendu parler de cette difficulté narrative de Dr Who, mais je ne connais pas du tout la série (alors que c’est un nombre pour un nerd de SF comme moi !!).
      :croa:

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