J’étais content de prendre un petit moment avant de repartir à Nantes pour voir cette exposition. Ron Mueck m’avait marqué avec beaucoup de gens en 2005 avec une œuvre incroyable au sein de l’exposition “Mélancolie” au Grand Palais (expo qui a marqué tant de gens). C’était un gros bonhomme surdimensionné et nu, prostré et d’un hyper-réalisme troublant et fascinant. En 2013, il y avait eu cette exposition à la Fondation Cartier qui avait eu un succès fou mérité, et dont les sculptures poursuivaient cet hyper-réalisme et une narration très subtile, parfois subliminale, mais aussi souvent très obscure ou laissant la place à beaucoup d’interprétations. Mais le truc c’est que ces œuvres ne laissent absolument pas de marbre, on est obligé de ressentir quelque chose.
Il y a très peu d’œuvres, il ne faut pas croire que l’exposition se visite pendant des heures, mais c’est le processus même de l’artiste. C’est très très long de créer ces sculptures réalistes, et en dix ans il n’y a pas eu des dizaines ou des vingtaines de nouvelles œuvres de l’artiste. Et malgré tout, l’intention change, ou le message se transforme peu à peu (si tant est qu’on puisse le fixer). J’ai trouvé génial de retrouver dix ans plus tard le même artiste, mais de le voir aussi évoluer dans le fond et la forme.
On arrive face à Mass (2017) qui présente une impressionnante série de crânes immenses blancs comme jetés au hasard dans l’immense salle vitrée à l’entrée de la Fondation Cartier. On dirait une collection de vanités d’un cabinet de curiosités mais à la taille incroyable, et qui envahisse complètement l’univers. C’est très troublant, et étonnamment vraiment très beau. (Et vraiment différent de ce qu’on connaît de Ron Mueck !)
Avec cette structure vitrée, on voit aussi bien l’expo du jardin de la Fondation Cartier, et aussi une autre œuvre surprenante : Dead Weight (2021). Le crâne noir fait 1700kg et est en fonte, avec les traces bien visibles du procédé de moulage, ce qui est encore en contraste avec les sculptures hyperréalistes qu’on connait de l’artiste.
A girl (2006) est vraiment classique sur le coup, avec une sculpture géante d’un nourrisson tout juste né et avec une expression absolument incroyable. Et cette taille est tellement marquante et impressionnante !!
Untitled (Three dogs) (2023) présente trois chiens noirs très menaçants qui font vraiment penser au cerbère avec en plus une taille qui vous fait sentir tout petit. Et c’est marrant cette fois de constater le réalisme des toutous, mais sans aller au détail du tout, on reste sur une simple forme lisse et monochrome, et donc au final pas réaliste du tout, ou justement “surréaliste”.
Baby (2000) est ultra-flippant et génial. On le voit à peine, tant c’est un minuscule truc sur un mur, mais ça ressemble de loin à un clairement à un crucifix, et de près c’est une sculpture hyperréaliste comme à l’habitude de l’artiste, mais avec une position vraiment singulière, et surtout un regard mais un regard terrible !!!!
This Little Piggy est également une surprise puisque contre toute attente c’est une œuvre à venir, une maquette d’une future œuvre. Ce n’est qu’une réplique en glaise, on ne sait pas quelle taille elle aura, si c’est juste une ébauche, ou ce qui sert d’ossature à des couches de matières à venir ? Et c’est également creepy à souhait avec des hommes qui s’emparent d’un cochon pour le saigner…
Et enfin, Man in a boat (2002) présente une sculpture hyperréaliste un poil trop petite par rapport à la barque dans laquelle l’homme nu est installé. Il a une attitude assez indescriptible, regardez donc. 
C’est fascinant, et on peut vraiment rester longtemps à faire le tour, et à s’inventer des histoires. Ce réalisme étrange lui donne une sorte de vie très chuckyesque. Hu hu hu.
C’était un très bon avant-goût de l’expo Hyper sensible que je dois aller voir prochainement au musée d’Arts de Nantes.
